Au secours il revient !
Qu'il était lourd le silence qui a accompagné la révélation faite par Christophe Delacroix « Et si Gripond restait » (Ouest-France, 23 août). Certes le scoop avait sans doute été initié par Robert Budzynsky lui-même, le couple n'en est pas à son premier coup d'essai, mais il y avait pourtant matière à ruer dans les brancards. Silence, écho zéro… inquiétant. Presse Océan n'a pas non plus jugé utile d'en parler. Révélateur ? Deux semaines plus tard, l'idée fait son chemin. Rudi Roussillon est interviewé à ce sujet et il prépare doucement le terrain « j'étudie la question ». Le revirement est de taille. Jean-Luc Gripond ne part plus. Il descendra manifestement tout juste d'un échelon dans la hiérarchie du club. L'officialisation est délicate. La photo officielle de l'effectif pro est encore fraîche, sans Japhet N'Doram, tandis que le nouvel organigramme du club tarde à prendre forme. Robert Budzynsky partira fin octobre et Jean-Luc Gripond se glisse subrepticement dans un fauteuil plus large encore. Comme s'il le croyait plus confortable aussi…
Le Dizet dans le collimateur.
Il serait pourtant dans l'ordre des choses, d'autant que les déclarations de Rudi Roussillon avaient valeur de promesse, que l'ex-Président quitte définitivement un club qu'il a failli précipiter en L2 en accumulant mauvais choix et mensonges. Il est surtout bon de le rappeler haut et fort à l'heure où Serge Le Dizet subit les conséquences de son retour aux affaires. Il n'est certes pas question de souscrire à l'idée qu'il s'agisse d'une campagne de déstabilisation savamment orchestrée. Candeur ou pas, il est préférable de croire à un Président inexpérimenté et mal conseillé par un prédécesseur qui n'en est pas à sa première bourde. Pourtant le résultat est là : certains supporters aveuglés par l'étiquette madrilène de Javier Portillo commencent déjà à demander la démission du jeune entraîneur des Canaris et lui envoient des lettres d'insultes. C'est insupportable ! Dans le nombre certains criaient sans doute « Gripond démission » la saison dernière. Ils devraient se reprendre, car l'urgence d'hier est toujours d'actualité.
Gripond derrière l'épisode Portillo
Serge Le Dizet a récemment expliqué un refus qui est essentiellement technique. Accordons à celui qui revendique la filiation de Coco Suaudeau d'avoir un jugement avisé en la matière. Cela ne l'empêche toutefois pas de se demander comment Javier Portillo est sorti du chapeau de sa direction bicéphale. Il est accessoire de chercher à savoir qui de Roussillon ou Gripond est allé à la pêche au Madrilène. La logique voudrait que ce soit le second, puisque le nouveau Président du FC Nantes débarque à peine. Il est plus étonnant de constater qu'ils aient pris tous deux autant de liberté vis à vis de leur entraîneur et se soient sentis soudainement avisés au plan technique. Il est même clair qu'ils ont privilégié l'effet d'annonce quand Rudi Roussillon entretenait encore l'espoir lors de la rencontre entre l'OGC Nice et le FC Nantes, quatre jours après que Serge Le Dizet lui ait indiqué ne pas vouloir de l'éternel royal espoir, comme nous l'apprenait Raphaël Bonamy (Ouest-France) lors de l'émission radiophonique « Lundi c'est Canari » (FBLO). Rudi Roussillon prit alors clairement le risque de déstabiliser Serge Le Dizet alors qu'un bon Président sait qu'il doit protéger son entraîneur, même la veille d'un remerciement poli...
A quand la fin des dissensions ?
Nous en sommes là encore aujourd'hui. Serge le Dizet est pris à parti et l'épisode du vrai-faux transfert de Portillo, après celui de Fred, agit comme un coefficient multiplicateur du légitime mécontentement engendré par les récents mauvais résultats de l'équipe. Les « Le Dizet démission » vont bientôt envahir La Beaujoire si les résultats ne changent pas. Après moins de 10 journées, ce serait une nouveauté bien peu nantaise. Or si Jean-Luc Gripond a imposé sa patte sur le club, c'est bien celle de faire péter un fusible technique de temps à autres. Le torchon brûle entre la direction et son entraîneur à tel point que le PDG du FC Nantes juge utile de nier l'évidence sur son site officiel. La paix sociale, une de ses principale mission depuis son intronisation, n'aura pourtant des chances de revenir que si Gripond s'en va et pas seulement Budzynsky ou Eric Leport, lequel travaille lui aussi toujours au club (il était en mission à l'UEFA la semaine dernière pour défendre la formation). Or aujourd'hui, on a le sentiment que si Denoueix n'est pas revenu, c'est bien parce que Gripond n'était pas censé partir…
Roussillon : bien mais.
En conséquence nous nous demandons ce qui a véritablement changé au club depuis l'arrivée aux commandes du bras droit de Serge Dassault. La balance entre attentes et changements est largement défavorable. Au crédit du Président, on concèdera le maintien de Jérémy Toulalan dans l'effectif, même si on le doit davantage à l'opportunité Tiago (milieu de terrain transféré de Chelsea à l'OL) qu'à une réelle volonté de ne pas le céder. Assurément, le Président l'a dit lors d'une réunion avec les supporters, à 12 ou 15 millions Toulalan s'en allait. Selon le joueur, le club est toujours vendeur. Le milieu de terrain qui nie avoir été augmenté comme le laissait entendre son Président, n'est assurément pas enclin à revivre une telle intersaison qui rejaillit de manière évidente sur son rendement actuel sur le terrain. Au crédit de Rudi Roussillon encore, et sans retenue, on lui accordera de ne pas avoir imposé Portillo à son entraîneur. Tous les Présidents de L1 n'agissent pas avec de tels égards. Mais le mal est fait.
Comment ne pas dépenser des millions…
A l'inverse, qu'en est-il de la cellule recrutement ? Il faut sans doute être patient et ne pas pleurer d'avoir vu ce secteur vidé de son sens en pleine période de transferts. Après tout, Rudi Roussillon n'a fait que récupérer une situation catastrophique laissée par son prédécesseur. En a-t-il pourtant simplement conscience aujourd'hui, alors qu'il envisage de donner la responsabilité de ce secteur à celui qui a pour seul but de profiter de cette période pour rééquilibrer ses mauvais comptes ? La myopie comptable de Jean-Luc Gripond a engendré une dix-septième place qui greva encore le budget alloué au recrutement pour cette saison. Certes l'ex-Président a participé à la venue de Bamogo, en prêt sans option d'achat. Serge Le Dizet l'a accepté d'un oui contrit. Raphaël Bonamy (Ouest-France) nous apprend pourtant que c'est déjà Jean-Luc Gripond qui avait choisi quelques semaines plus tôt, d'entériner le prêt payant de Bagayoko à Nice, contre l'avis du coach Nantais qui ne s'opposait pas à ce départ pour peu qu'on lui trouve enfin l'avant-centre qu'il n'a jamais cessé de réclamer à la condition de « ne pas prendre pour prendre ». Or le club n'a jamais envoyé personne au Quatar pour convaincre émirs et dirigeants de lâcher Dennis Oliech. Rudi Roussillon a préféré faire jouer des relations pas toujours footballistiques qui lui font dire qu'il a tout tenté. Le comble est qu'on prévoit seulement maintenant d'envoyer un émissaire du club dans le Golfe. Et c'est encore Jean-Luc Gripond qu'on sort du trou, alors que Japhet N'Doram est enfin en fonction ! Pour quel résultat attendu ? Les Qataris vont-ils lâcher leur joueur durant le mercato ? Mais pourquoi le feraient-ils cet hiver plutôt que cet été. A propos de ce fameux désir d'avant-centre, « arlésienne nantaise » depuis le départ de Viorel Moldovan, on passe encore tous les autres ratés pour raisons financières ou réactivité à reculons (Santos, Niang, Dindane) alors qu'on débloque une enveloppe farfelue de 6,5 millions d'euros pour un joueur finalement acheté 15 millions par l'OL. Le FC Nantes a toujours dans ses caisses les 4 millions annoncés (2 millions dépensés, 2 millions provisionnés pour Bagayoko). Mais fin décembre un nouveau déficit les engloutira à coup sûr. D'ailleurs ces 4 millions ont-ils jamais réellement existé. Avant de partir en stage, Serge Le Dizet nous avait personnellement incité à nous interroger à ce sujet… On n'avait pas compris à l'époque ce qu'il savait déjà.
Que Gripond parte et que Le Dizet bosse en paix.
Evidemment, Jean-Luc Gripond n'est pas sur le terrain, mais son influence insidieuse reste néfaste. A moins que ce ne soit toujours son incompétence avérée qui le guide, il continue à régler ses comptes. Une ombre néfaste, sous-marin jaune, rôde et gangrène. La Socpresse est désormais toute puissante au club et le domaine technique en pâti à tous les niveaux. On crie à l'aide car il est absolument nécessaire que l'harmonie revienne et que les dissensions s'estompent enfin. Pour cela Jean-Luc Gripond doit partir et Serge Le Dizet doit digérer une intersaison mouvementée pour se concentrer essentiellement sur le terrain. C'est son vœu le plus cher. Il a été trimballé de nouvelles responsabilités en déresponsabilisation. Il lui est bien difficile de faire abstraction des derniers évènements. Après une période de trouble, il est toujours bon de dire « place au terrain ». Depuis plusieurs saisons, il faut le répéter inlassablement car les déclarations d'intention sont rarement suivies d'effet.
Frédéric Porcher, le 15 septembre 2005.
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