Par Litteulced.
Il est 9h ce lundi matin lorsque je me présente,
comme convenu, au siège du mythique journal. La plupart
de mes camarades sont exacts au rendez-vous : le Boss, manifestement
nerveux et à l’étroit dans son magnifique
costard jaune et vert loué pour l’occasion.
Pascal Praud, frétillant et piaffant d’impatience,
qui a réussi à extorquer sa venue contre une
promesse de participation à "Qui veut gagner
des millions" ("En plus Fred, je le connais bien
Olivier, c’est un super pote à moi").
Olivier Quint est déjà là, la mèche
précise et le sourire de VRP ("je suis un peu
la caution morale de ce groupe"). Il ne manque plus
que notre fidèle Da Roch’ qui ne tarde pas
à débouler au pas de course. Enfin, quand
je dis pas de course tout est relatif. Sauts de cabri serait
déjà plus adéquat. Monté sur
ressorts, il m’explique qu’il a passé
la nuit avec un groupe de jeunes en provenance direct d’Amsterdam,
ceux-ci n’ayant pas eu trop d’une nuit pour
lui faire découvrir les subtilités de la culture
hollandaise. Pendant qu’il saute sur Olivier Quint
et tente de l’embrasser sur la bouche, notre Rédac’Chef
donne le signal du départ et nous nous dirigeons,
fébriles, vers l’entrée du Saint des
Saints. C’est le moment que choisit Da Roch’
pour s’encastrer lamentablement dans la porte vitrée
du journal. Faisant fi des cris de douleur du bonhomme,
nous rentrons, l’air dégagé et conscient
de l’importance du moment pour notre petite PME.
C’est Olivier Rey en personne qui accueille notre
petite troupe : La mèche toujours présente,
comme une compagne inoxydable qui aurait passé sa
vie à faire un bras d’honneur aux règles
élémentaires de l’esthétique,
la gauloise bien calée au coin du bec et la veste
en velours fièrement portée, Maître
Rey nous salue un par un, réprimant difficilement,
toutefois, un mouvement de recul au moment où Pascal
Praud se précipite sur lui pour lui faire la bise.
"Bon alors les gars ! Paraît que vous voulez
me suivre toute la journée pour faire un reportage
sur ma pomme ? Faisez gaffe ça va dépoter
! Avec moi ça finasse pas, pas l’temps d’faire
des gri-gri c’est droit au but ! Ah ah ah ! Allez,
suivez-moi c’est l’heure de la conf’ de
Rédac…"
9h10 : Conférence de Rédaction dirigée
par notre gourou. Les pieds sur le bureau et le clope au
bec, notre ami dirige tout ça de main de fer. Impressionnant.
Olivier Rey : "Bon les nazes, qu’est-ce
qu’on a à se mettre sous la dent aujourd’hui
?
Stagiaire apeuré : Je pensais à
un reportage qui mettrait en relation la notion euh…
de capitalisme sauvage…avec, éventuellement
si vous êtes d’accord, la fuite de euh…
nos jeunes joueurs vers l’étranger. Si vous
voulez bien.
Olivier Rey : Hein ?
Stagiaire effrayé : C’est-à-dire,
c’est juste une idée comme ça, on pourrait
illustrer l’article avec une interview de Mathieu
Flamini. Par exemple. Si vous êtes d’accord…
Olivier Rey : Tu te fous de moi ? Tu crois
qu’on est là pour concurrencer la Tribune ou
quoi ?
Stagiaire dégoulinant : Non non
Chef c’est pas…
Olivier Rey : Arrête ! tu m’dégoûtes…
Un jeune que j’ai formé moi-même, comme
mon propre fils… JE TE L’AI DIT 100 FOIS !!
Tu veux faire un article sur Flamini c’est ça
?
Stagiaire cramoisi : Ben euh… Voui
pourquoi pas ?
Olivier Rey : Eh ben c’est pas compliqué
triple buse ! Tu met en titre "Flamini - Real : ça
chauffe" et tu brodes à l’intérieur
!
Bon, les autres, quelque chose à signaler ?
Stagiaire2, assuré : Chef, j’ai
un copain qui sort avec la sœur d’un pote à
lui dont la cousine est mariée à un gars qu’habite
pas loin de chez Drogba. Eh ben ce gars-là, il paraît
qu’il aurait entendu Drogba dire qu’il en avait
marre de ce temps pourri. Qu’est-ce que je fais ?
Olivier Rey : Ca c’est un scoop.
Tu nous met en Une : "Drogba vers Barcelone : c’est
fait", on va faire un carton !"
Fortement impressionnés tout à la fois par
le charisme de notre gourou et sa capacité d’analyse,
nous sortons du bureau à sa suite sans moufter. Il
est déjà 9h12, la réunion a été
intense et fructueuse, Olivier goûte un repos bien
mérité à la machine à café
:"Bon, vous avez vu, c’est sûr que c’est
pas toujours facile mais je crois que j’ai quand même
réussi à poser mon empreinte sur le journal.
Ce qui est important pour un bon journaliste, c’est
d’être à l’affût des infos
et, surtout, de toujours vérifier ses sources. Bon,
maintenant j’ai une pause jusqu’à l’émission
de Gégène de ce soir. On la fait cette interview
?" Repoussant d’une main Da Roch’ qui tentait
de le serrer dans ses bras, Maître Rey nous entraîne
d’un pas rapide dans son bureau. Le spectacle peut
alors commencer :
Pascal Praud : T’aurais pas une
place de stagiaire dans ton journal ?
Olivier Rey : Stagiaire Machine à
café, pourquoi pas, mais attention hein ! Mon café
c’est au lait avec deux sucres et demi ! Une boulette
et je te vire.
Olivier Quint : Comment se fait-il que
vous ne m’annonciez jamais ailleurs qu’à
Istres, Ajaccio ou Strasbourg ?
Olivier Rey : Faut pas déconner
non plus, t’as déjà réussi à
entuber Budzinsky une fois, tu crois pas non plus qu’Aulas
va te tendre l’autre joue ?
FCNantes.com : Certains vous attribuent
une grosse part d’imagination dans vos scoops de transferts,
que leur répondez-vous ?
Olivier Rey : Que ma présence dans
l’émission à Gégène suscite
des convoitises et fait beaucoup d’envieux, je ne
vois pas d’autre raison. Vous savez, tous ceux dont
l’avis fait référence en matière
de football sont soumis aux jalousies, que ce soit Thierry
Roland, Charles Biétry ou Thierry Adam…
FCNantes.com : Pour terminer, si vous deviez
nous donner un conseil concernant notre site internet…
Olivier Rey : C’est sûr que
ça aurait bien besoin d’un petit relookage
votre affaire mais bon… Déjà, je changerais
le nom du site, un petit touslestransferts.com ça
aurait quand même plus de gueule pis ça attire
le chaland. Si vous voulez je peux même vous faire
un édito pour vous aider à décoller,
elle est pas belle la vie ?"
Un peu émoustillés par cette proposition
de parrainage prestigieux, nous nous retrouvons donc dehors
à rêver à un avenir brillant fait de
paillettes et de claques dans le dos avec les potes à
Gégène… Tout guilleret, nous chambrons
allègrement notre Redac'Chef de s'être encore
une fois dégonflé au moment de demander au
Rey s'il cachetonnait à l'OL comme Vendroux le faisait
chez Bez et Rocher. Comme d'hab' il botte en touche : "On
va pas tuer la poule aux obus d'or non plus". J'ai
toujours adoré la finesse des butades du Chef...
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