Le hasard
chanceux du calendrier ?
De la chance, Serge Le Dizet et ses joueurs en ont eu effectivement..
Pas sur le contenu de la rencontre évidemment, puisque
la supériorité nantaise fut criante. Non,
c’est plutôt au calendrier que l’on pense
: devoir rencontrer le voisin et « ennemi »
rennais, à domicile lors de cette deuxième
rencontre de championnat après la reprise, s’est
révélé être une aubaine. Si le
match contre Bastia nous a rappelé (une dernière
fois ?) le visage du FC Nantes du mois de décembre,
c’était comme pour en finir avec un mauvais
cycle. Ce match contre Rennes, cette quasi rédemption
du jeu et du plaisir prôné par le tout nouveau
coach, arrivait à point nommé pour mobiliser
toutes les énergies et l’envie de bien faire,
malgré une pression qu’on savait énorme
et qui fut apparemment parfaitement gérée.
Même si Serge Le Dizet s’attache à prendre
chaque match comme des étapes successives et laborieuses
vers le maintien, ce derby avait évidemment un parfum
particulier, d’autant que les Rennais, Lazlo Boloni
et Olivier Monterrubio en tête, pensaient que le moment
était venu, que les conditions étaient réunies,
pour faire enfin chuter l’invincibilité des
jaunes à domicile. Ils l’ont dit. Un peu trop
peut-être. Ces déclarations perçues
comme autant de tirs sur l’ambulance ont titillé
les orgueils.
L'effet Landreau.
Si on choisit de parler de chance, c’est bien qu’on
est souvent désemparé, pour expliquer comment
le jeu peut renaître ainsi, de manière parfois
éclatante, alors qu’il était oublié
depuis plusieurs mois et que Nantes était petit à
petit devenu une équipe quelconque, orpheline et
vulnérable. On l’a écrit : Nantes avait
vraiment touché le fond. Les « ça va
passé, ça va revenir » qu’on sentait
poindre derrière l’immobilisme du discours
présidentiel et de la méthode de l’entraîneur,
étaient devenus insupportables et allaient conduire
le FC Nantes à sa perte. Certes, ce jeu qui revient,
c’est toujours la preuve que le flambeau qui se passe
de générations en générations,
que le travail des formateurs par la répétition
des gammes et la mise en éveil des intelligences
individuelles au service du collectif, que cette philosophie
là sauvera encore longtemps le club pour peu que
les nouveaux arrivants ne veuillent pas tout révolutionner
et qu’il reste des anciens pour prêcher la bonne
parole (Da Rocha, Savinaud, Landreau) et des nouveaux dont
le talent est à l’écoute (Toulalan,
Yapi, Keserü). Certes. Mais il a tout de même
fallu se faire sacrément violence pour se donner
une nouvelle chance. Il a fallu faire avec des instances
dirigeantes, pas seulement à Nantes, prêtes
à vous tomber dessus au moindre faux pas pour défendre
ses vieux bouts de gras, pour justifier la paranoïa.
A Nantes plus qu'ailleurs.
En apparence, passer en trois jours, de la médiocrité
entrevue à Bastia au plaisir ressenti contre Rennes,
est assez incroyable. Peut-être est-ce après
tout assez courant. D’autres clubs connaissent des
hauts et des bas. Peut-être qu’à Nantes,
on se regarde un peu trop le nombril. Ca en agace certains
ce discours Nanto-Nantais. Ca exaspère certains de
lire que le football français a besoin du FC Nantes.
Si la victoire contre Rennes n’est pas qu’un
accident, si elle marque le début du renouveau, on
s’excusera pourtant de penser que ce phénomène,
cette capacité à la métamorphose pour
enfiler toujours cette même bonne vieille peau, celle
qui brille, est plus extraordinaire à Nantes qu’ailleurs.
Ici on aime à s’aimer et à se retrouver.
A la recherche du temps perdu
Chaque entraîneur connaît des périodes
de tempête et a sa méthode pour y échapper.
A Nantes, les entraîneurs passent, surtout s’ils
n’ont pas conscience que c’est avant tout en
se recentrant sur ce qui fait la spécificité
de la marque jaune, qu’ils s’en sortiront. S’ils
ont été aussi nombreux ces derniers temps,
c’est bien que les choix n’étaient pas
bons que les objectifs n’étaient pas clairs.
Le discours de Loïc Amisse ne passait plus. Le coup
de gueule de Landreau, la nomination de Serge Le Dizet permettent
aujourd’hui de colmater les fissures. La langue parlée
est bien celle de Denoueix et de Suaudeau et ça rassure.
On sait où on va mais on a perdu du temps et on a
raté le coche encore une fois.
Le recrutement, encore...
Le recrutement de l’intersaison est la responsabilité
de Jean-Luc Gripond, de Robert Budzynski et de Loïc
Amisse. Inutile de chercher à savoir lequel des trois
est le plus fautif. Le premier pour sa frilosité,
ses palabres financiers, sa gestion administrative déficiante.
Le second pour avoir oublié ou s’être
simplement trompé quant aux joueurs proposés.
Les joueurs ne rentraient pas dans le moule, leurs qualités
individuelles étaient insuffisantes. Ne pas avoir
les moyens de toucher les très bons doit susciter
de travailler encore plus pour trouver les bonnes parades.
C’est aussi une question de temps. Le temps de voir
que Yapi, Diallo sont des joueurs faits pour Nantes, que
Bagayoko, Capoue, Bratu ne le sont pas. On sait aussi qu’il
est plus facile de trouver des joueurs qui correspondent
au jeu à la nantaise que des joueurs susceptibles
d’enrichir la palette. Loïc Amisse s’est
trompé sur Viveros. Il a aussi été
trop gentil ou trop effacé, ce qui l’a contraint
à ne pas pouvoir se plaindre quand le mal était
fait. Alors ces trois là se sont renvoyés
la balle et ça n’était pas du beau jeu.
Le cas Keserü
Claudiu Keseru, à la peine en CFA après des
débuts tonitruants, a été façonné
par Le Dizet, même si les deux hommes ont du en passer
par des périodes de désamours ou d’incompréhension.
Le Dizet a bichonné son Roumain. Le club a fait ce
qu’il fallait pour l’intégrer au mieux.
Il n’a pas à faire à un ingrat, car
le joueur est à l’écoute. On ne saurait
conseiller Florin Bratu, s’il n’est pas déjà
trop tard (il est le seul joueur à ne pas être
aller au centre du terrain à la fin de la rencontre),
d’abandonner sa moue perpétuelle et de s’inspirer
de son jeune compatriote. Il reste désormais à
vite s’entendre sur les termes du contrat qui devrait
être signé sans tarder. Car Keserü l’a
dit, il veut continuer de progresser à Nantes. Une
belle référence quand on entrevoie le potentiel
du joueur avec à la clé, une image entretenue
lorsque le joueur se rappellera aux bons souvenirs de La
Beaujoire, alors que sa destinée le poussera vers
des pelouses plus renommées.
La méthode Le Dizet.
Enfin la métamorphose de samedi, c’est aussi
les retours de Da Rocha et Pascal Delhommeau. Le premier
à un niveau oublié, après avoir endossé
un rôle de cadre épuisant en début de
saison, dans l’adversité d’une équipe
faite de bric et de broc et face au manque de répondant
environnant. Le second car il a, depuis le départ
de Yepes, pris une dimension insoupçonnée
qui, aujourd’hui, semble pouvoir faire taire les plus
récalcitrants et qui nous donne raison de l’avoir
toujours défendu. Serge Le Dizet a vu les joueurs
un par un, il a entendu des joueurs qui se savaient écoutés.
La méthode a séduit, le discours a été
simplifié et compris. La synthèse s’est
muée en tactique et les Rennais se demandent encore
comment Nantes a joué et pourquoi ils n’ont
pas trouvé la solution. Assurément, Serge
Le Dizet a plus appris à Nantes qu’à
Rennes. C’est un début de réponse.
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