En tout cas, il a appris à prendre son temps, c’est
peut-être aussi bien comme ça et il va probablement
signer prochainement son premier contrat pro. Récit
d’une carrière qui a commencé à
Brive, ville considérée comme pays du rugby
mais dont le club, L’Etoile, qui fut celui de Milos,
a tout de même éliminé Auxerre de la
Coupe de France en 2004.
L’histoire entre le FC Nantes et Milos Dimitrijevic
commence, comme celle de beaucoup d’autres jeunes
Nantais, dans les années 1990, par un coup de fil
de Guy Hillion. Chargé alors d’approvisionner
la volière des Canaris, il téléphone
à tout hasard en Corrèze à l’un
de ses contacts dont il n’a plus de nouvelles depuis
un certain temps. « Tu n’aurais pas vu un jeune
prometteur ces derniers temps ? Le genre milieu offensif?
» Philippe Caquinot, le correspondant de Hillion,
suit tous les matches qui se déroulent dans son département
et, tout de suite, un nom lui vient à l’esprit
: « J’ai ce que tu cherches. Milos Dimitrijevic.
Un fils de footballeur. Un gamin intelligent qui sait tout
faire et voit plus vite que les autres. Il joue avec les
15 ans Nationaux de Brive, il est surclassé ! »
Fils d’un joueur du Partizan
Hillion a confiance en Caquinot, il prend donc sa voiture
et la direction de Brive. Sur place, un seul match lui suffit
pour s’assurer que les renseignements sont bons. Il
va donc frapper à la porte des Dimitrijevic. Le père
a effectivement joué au Partizan de Belgrade et il
n’a qu’un souhait : voir son fils courir sur
ses traces et même le dépasser. Milos, lui,
aussi loin qu’il remonte dans ses souvenirs, y retrouve
la trace d’un ballon de foot. Pour assister aux matches
de son père, à Belgrade dans sa petite enfance,
puis en France à Valence, Dijon et Brive. Et, surtout,
pour s’amuser lui-même.
Attiré par le foot de Nantes
Guy Hillion, qui travaille aujourd’hui pour Bordeaux,
se rappelle une discussion serrée où il avait
dû user de toute sa force de persuasion. C’est
que Nantes n’était pas le seul club à
avoir flairé le bon filon. La bonne réputation
du football des Canaris avait toutefois fait la différence.
Le père de Milos, dont la carrière a été
écourtée par un accident d’auto, jouait
meneur de jeu, il aimait les artistes élégants,
les prouesses techniques, les virevoltes qui enrhument l’adversaire,
les offensives qui partent en feu d’artifice. Son
fils est du même sang. « J’ai pensé
que le jeu de Nantes était celui qui correspondait
le mieux à mes qualités et à mes idées,
» dit-il.
La confiance de Le Dizet
Il débarque à Nantes durant l’été
1998, à l’époque de la Coupe du monde.
Il a 14 ans. Il fréquente le centre de préformation
de Saint-Sébastien puis il entre à la Jonelière
où sa mère, qui l’a suivi, a trouvé
un emploi. Il progresse doucement, sans à coups.
Mais il est observateur, ouvert aux discussions et il comprend
vite. En 2002, il fait partie de l’équipe qui
enlève la Coupe Gambardella. Il joue bientôt
en CFA et le courant passe bien avec Serge Le Dizet. Le
futur coach de l’équipe première lui
fait confiance et il le pousse à ne pas trop s’impatienter
quand, alors qu’il guette vainement sa chance, il
voit quelques uns de ses copains jouer avec les pros. Il
ne fait même pas parti de la trentaine de joueurs
dont le club donne la liste aux médias durant l’été
2004 en la présentant comme « l’effectif
de la saison ». Quand la photo officielle est prise
en juillet, il n’est d'ailleurs pas convoqué.
Et nul ne s’en étonne.
Même pas sur la photo
Evidemment, il n’a pas de maillot attribué.
Aussi est-ce avec le numéro 33 dans le dos qu’il
effectue sa première apparition en pro, le 10 novembre
dernier à l’occasion de la Coupe de la Ligue
contre Laval. Il remplace Loïc Paillères en
seconde période. Trois jours plus tard, il débute
en Ligue 1 : il joue le dernier quart d’heure à
Lyon. Cette soudaine promotion n’est pas le fruit
du hasard. Depuis le début de la saison, il brille
avec l’équipe de CFA et Serge Le Dizet pousse
à la roue pour qu’il soit testé à
l’échelon supérieur. Loïc Amisse
a fini par se laisser convaincre.
Aussi simple que ça
Milos Dimitrijevic n’a pas évolué dans
le registre qu?il affectionne, celui de meneur de jeu, comme
son père jadis au Partizan de Belgrade, mais le simple
fait de jouer suffit dans un premier temps à son
bonheur. Surtout qu’il est rapidement invité
à rejoindre le groupe pro. A près de 21 ans,
le temps commençait tout de même à lui
peser. Le changement d’entraîneur ne l’a
pas contrarié. Il n’a évidemment pas
de critique à formuler à l’encontre
d’Amisse, mais, sous la férule de Le Dizet,
le FCNA retrouve ses vraies valeurs. Alors, plus on jouera
à la nantaise, plus Dimitrijevic aura de chances
de briller. C’est aussi simple que ça. L’organisation
du milieu de terrain en losange favorise ses desseins car
elle lui permet d’espérer qu’il peut
trouver plus facilement une place dans une équipe
qui soigne son assise technique et balance beaucoup moins
de longs ballons en avant.
Exigeant et lucide
« Le coach m’a dit qu’il compte sur moi
et qu?il souhaite que je reste, que ma chance viendra, »
confie Milos qui a entamé les discussions pour signer
son premier contrat pro et qui espère les mener à
bons termes, pour peu que les offres se rapprochent de ses
désirs. « Pour l’instant, poursuit-il,
je grappille du temps de jeu, je progresse. Le match contre
Monaco m’a fait du bien, il m’a en tout cas
beaucoup appris.» A l’issue de cette rencontre,
Serge Le Dizet l’avait félicité. «
Non, je ne suis pas content de moi, avait rétorqué
Milos, j’ai perdu au moins deux ballons ». «
Il a été bon quand même, avait estimé
le coach et tant mieux s’il se montre aussi exigeant
avec lui-même, il n’en progressera que plus
sûrement.» Milos Dimitrijevic a confirmé,
en Coupe de France, qu’il prend de l’assurance.
« En ce moment, je peux dire que ça se passe
bien pour moi », dit-il. En dehors de ses évidentes
qualités de footballeur, sa lucidité constitue
un bel atout. Son plaisir de vivre, sa chaleur dans les
contacts humains, en sont d’autres. Il a mis du temps
pour arriver au niveau des pros. Ce n’est pas forcément
un handicap. « Au contraire, estime Philippe Caquinot,
l’homme qui l’avait découvert. Il s’est
équilibré, il a mûri et le jour où
il deviendra titulaire ce sera pour longtemps ». A
Bordeaux, Guy Hillion, lui, continue à penser que
c’est une véritable pépite qu’il
était allé chercher en terre corrézienne.
Pour un peu, ayant changé de club ensuite, il regretterait
presque de l’avoir découverte trop tôt.
B.V.
A consulter le site consacré à Milos Dimitrijevic
(et David Leray) : Miloschedavid.free.fr
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