C’est le match le plus long de l’histoire de la Coupe de France.
Peut-être le plus long de tous les temps, il faudrait vérifier
à travers le monde. Il a duré 469 minutes ! Sept heures
et 49 minutes ! Le tout étalé sur 5 rencontres. C’était
durant la saison 1957-58. A l’époque, le règlement
de la Coupe était simple : on jouait jusqu’à temps
qu’il y ait un vainqueur. Pas de pénalty au bout de deux
heures mais match à rejouer. Et à rejouer encore en cas
de nouvelle égalité… En 1957-58, il y eut ainsi 5
matches entre le FC Nantes, qui jouait alors en 2è Division, et
le Stade Malherbe de Caen qui évoluait en CFA. L’un d’eux
cependant n’était pas allé à son terme : il
avait été arrêté par la pluie.
Zaetta venait d’arriver |
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C’est en 64è
de finale que les Canaris, entraînés alors par Louis
Dupal, avaient hérité des Normands au tirage au sort.
Ils étaient logiquement favoris, même si Caen était
considéré comme un spécialiste de la Coupe
depuis que, trois saisons plus tôt, il avait éliminé
le Stade de Reims, le club français numéro un des
années 1950. Lors du premier match disputé en Normandie,
les Nantais n’avaient pourtant pas fait exagérément
les fiers. Face à une formation solide, animée par
l’ancien international André Grillon, ils avaient dû
se contenter d’un 0-0 qui n’avait d’ailleurs pas
semblé les désavantager. Daniel Eon en tout cas avait
été davantage sollicité que son vis à
vis, Brandao. « Un Lorrain comme moi », se souvient
Guelzo Zaetta qui, en cet hier 1957, s’apprêtait à
fêter son 26è anniversaire puisqu’il est né
le 20 décembre 1931 à Piennes. « Je venais tout
juste d’arriver à Nantes, raconte-t-il. J’avais
débuté la saison avec Angers ». |
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Guelzo ne savait évidemment pas qu’il allait
s’installer durablement en Loire-Atlantique (on disait Loire-Inférieure
en ce temps-là) et devenir l’adjoint de José Arribas
puis le précurseur de la formation.
Troisième match, troisième 0-0
La deuxième rencontre se déroula à Nantes. Là,
les Balloche, Gabet, Bouteiller, Jort, Jacques, essayèrent de passer
la vitesse supérieure. Ils dominèrent. Mais en vain puisque
les deux équipes se séparèrent sur un nouveau 0-0.
Elles en étaient à quatre heures de jeu et aucune d’elles
n’avait marqué le moindre but. La Fédération
ne s’affola pas pour autant. Trois matches, c’était
rare mais pas extraordinaire. Elle se borna à inviter les deux
formations à en découdre une troisième fois, sur
terrain neutre, à Tours. Seulement, au bout de deux nouvelles heures
d’affrontement, personne n’était davantage avancé.
Toujours 0-0. Les Nantais ne s’en plaignaient d’ailleurs pas
puisqu’ils avaient eu très chaud : un tir caennais avait
été renvoyé par la transversale de Daniel Eon. Une
quatrième rencontre fut fixée, toujours à Tours,
une semaine plus tard, le 5 janvier. Qui sait : avec l’année
nouvelle, les attaquants retrouveraient peut-être leur inspiration...
Terrain transformé en étang
Ce fut effectivement ce qui arriva puisque dès la 2è
minute Guelzo Zaetta ouvrit la marque pour Nantes. « Lachaise avait
tiré une première fois, rapporte-t-il, Brandao a repoussé
et j’ai repris de demi-volée ». Le problème
est qu’il pleuvait des cordes sur Tours et le terrain gras du stade
de Grandmont se détériora rapidement. A la 19è minute,
au grand dam des Nantais, l’arbitre, M. Chavigny, décida
d’interrompre les débats. Roger Bastide écrivit dans
« Le Miroir des Sports » : « Le vent ridait la surface
du terrain comme s’il se fut agi d’un étang. Sans la
décision de l’arbitre, le combat eut fini prématurément
non pas faute de combattants, car tous étaient également
résolus, mais faute de munitions : on eut tout juste risqué
de noyer plusieurs ballons ».
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Daniel Eon arrêtant le ballon sur le marécage de Tours.
L'arbitre interrompit la partie à la 19è minute |
Ce jour-là, Guelzo Zaetta estima pourtant que
la partie aurait pu continuer. Il n’a pas changé d’avis
47 ans plus tard : « L’arbitre est seul juge, bien sûr,
il n’empêche que je me souviens avoir joué par moins
15 degrés, à Besançon par exemple, et c’était
autre chose que la pluie de Tours ».
But d’André Bouteiller, enfin |
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Toujours est-il que le but marqué par Zaetta ce dimanche-là
ne servit à rien et qu’il ne figure même sur
aucune tablette, le résultat n’ayant évidemment
pas été entériné. Nantais et Caennais
en étaient donc réduits à un cinquième
rendez-vous et, cette fois, la Fédération commençait
à trouver l’affaire saumâtre. Quand le vainqueur
de ce marathon allait-il pouvoir affronter Bordeaux, l’adversaire
que le tirage au sort lui avait été attribué
en 32è de finale ? C’est le 12 janvier 1958 que Nantes
et Caen se départagèrent enfin. Ils jouaient au Mans
et le coup d’envoi avait été donné depuis
59 minutes quand le demi-droit André Bouteiller trompa enfin
Brandao, le gardien normand. On en resta là. 1-0 donc. Le
tout en près de 8 heures de match !
<<< (Photo) André Bouteiller, à droite, au
cours du cinquième et dernier match au Mans. C'est lui qui
marqua le but de la victoire. |
Eon blessé au tour suivant
Le FCN fut alors invité à presser le mouvement et à
disputer son 32è de finale dès le jeudi suivant. Ce ne fut
pas une réussite : Daniel Eon se cassa un bras en plongeant devant
Couronne et Nantes dut poursuivre la partie à 10, avec l’attaquant
Martial Jacques dans son but. Les Girondins gagnèrent 3-0. Nantes
dut attendre 21 ans pour conquérir enfin la Coupe de France, son
record, lui, n’a jamais été battu.
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Après s'être qualifié contre Caen, Nantes fut
éliminé par Bordeaux. Un match de triste mémoire
: Daniel Eon se fracture ici en bras en plongeant devant Couronne
(qui vint jouer ensuite à Nantes) et Yvon Jort. |
Le détail des rencontres
1er match, le 15 décembre 1957 à Caen : Caen et Nantes 0-0
(a.p.)
2è match, le 22 décembre 1957 à Nantes : Nantes et
Caen 0-0 (a.p.)
3è match, le 29 décembre 1957 à Tours : Nantes et
Caen 0-0 (a.p.)
4è match, le 5 janvier 1958 à Tours : arrêté
à la 19è minute
5è match, le 12 janvier 1958 au Mans : Nantes bat Caen 1-0.
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