Mardi : Dassault déblatère dans le journal
Serge Dassault, 81 ans mais tous ses crocs, même si certains sont sans doute en acier, monte à l'assaut dans les colonnes de « Presse Océan » et d' « Aujourd'hui ». On lui a dit que l'entraîneur de son club, le FC Nantes, a été sifflé par une partie du public, il assène : « eh bien, s'il n'est pas bon, y'a qu'à le changer. Et s'il doit effectivement partir, qu'il parte le plus tôt possible. »
On est au moins « rassuré » sur un point : Dassault, l'une des plus grosses fortunes de France, ce qui ne l'a pas exempté de quelques tracas judiciaires, sait bel et bien que le FC Nantes lui appartient. Il se plaît même, ou se com-plaît, (devant le p, il faut un m, n'est-ce pas !) à ajouter son grain de sel à l'agitation ambiante. Serge Le Dizet fait de plus en plus figure de fusible et de bouc émissaire. Franck Signorino qui avait dit que ce n'était pas le moment de déblatérer dans les journaux est servi. Le mauvais exemple vient d'en haut. Dassault attaque en rafales, il est vrai qu'il n'a peut-être jamais entendu parler de Signorino.
Rudi Roussillon essaie de désamorcer la bombe : « Serge Dassault ne fait jamais dans la langue de bois. C'est un homme qui fait son analyse à partir de bilans. On l'a interrogé, il a répondu brièvement mais il ne connaît pas le foot et il me délègue complètement le dossier FC Nantes. » Très bien. Il n'empêche que Rudi en profite pour réduire sensiblement le délai qu'il disait accorder à Serge Le Dizet. Il avait parlé d'un bilan à faire au bout de 10 matches. Puis de fin septembre (on en sera alors à la 8è journée). A présent, il laisse entendre que la façon dont se déroulera la rencontre face à Lille pourrait l'amener à prendre des décisions. D'autres supputent et laissent entendre que le sort du coach nantais est déjà réglé mais que Roussillon a apprécié l'attaque en règle de Dassault. Ainsi, il pourra virer Le Dizet sans écorner son image : il prétendra avoir obéi aux ordres de son patron, lequel se moque des critiques venant de Nantes comme de son premier char.
Si la direction n'est pas bonne, qu'est-ce qu'on fait ?
On aimerait toutefois poser une petite question, comme ça, en passant. Dassault a dit : « si l'entraîneur n'est pas bon, on le change ». Soit. Mais si c'est la direction qui n'est pas bonne, qu'est-ce qu'on fait ? On la change ? On a entendu des « Le Dizet démission » lors du match contre Troyes mais à Lorient ce sont des « direction démission » qui ont retenti. Allons, l'interrogation est saugrenue : un directeur ne démissionne jamais, il a toujours raison.
L'étau se resserre donc sur l'entraîneur. Lequel a eu une conversation téléphonique avec Roussillon et lui a confirmé qu'il souhaite un défenseur central supplémentaire.
Jean-Yves Queignec, le journaliste qui a interviewé Serge Dassault, joli scoop d'ailleurs, lui a posé une autre question : « concernant la vente du club avez-vous du nouveau ? » Réponse : « pour le moment on ne vend pas. » Nuance immédiate : « mais on verra, hein. » L'industriel a indiqué ensuite clairement l'objectif qu'il nourrit pour le club : il doit gagner de l'argent, comme n'importe quelle entreprise. « Moi, je garde les choses qui sont bonnes, » dit-il. Il ajoute : « à force de ne pas vouloir perdre de l'argent, on en perd encore plus. » Ce qui laisse, apparemment, la porte entr'ouverte à une revente à perte : il pourrait céder le club moins cher que prévu pour ne pas dilapider davantage. En somme, il lui déplairait fort de jouer le rôle longtemps tenu par Canal + à Paris. Mais s'il est vrai qu'on peut gagner de l'argent dans le foot, il faut tout de même admettre que rares sont ceux qui y réussissent. Et Rudi Roussillon, pour l'instant, ne semble pas avoir pris la bonne voie. Quant à vendre le club, à qui ? Les acheteurs potentiels ne manqueront pas, si le prix devient abordable mais auront-ils en tête la qualité du jeu ? Sauront-ils ce que signifie « le football à la nantaise ? » Ceux qui ont dirigé le club depuis 2001 l'ignorent totalement, on voit où ils en sont arrivés. Ils devraient prendre des cours, réviser l'histoire. Que Dassault le leur dise, clairement au lieu de répéter, comme il le fait trois jours plus tard sur les ondes d'une radio « j'en ai rien à foutre de ce club, le foot ne m'intéresse pas. » D'accord, m'sieu Serge, mais l'argent, lui, vous intéresse beaucoup, alors si vous voulez en gagner, et d'abord arrêter d'en perdre, expédiez des gens compétents !
Rudi Roussillon, lui, insiste dans les colonnes de l'Equipe : « je reste persuadé que nous avons réalisé un bon casting, le potentiel de cette équipe est reconnue par les spécialistes du foot français et la sixième place est un objectif raisonnable pour Nantes. » C'est qui les « spécialistes du foot français» à ses yeux ? Ses copains ? Ses valets ? Des voyants ? Pourvu que ce ne soit pas des aveugles !
B.V., le 2 septembre 2006
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