« Où y-a-t-il des manques ? » « Partout »
Les voici avant-derniers du classement. Avec une attaque qui ne marque toujours pas et une défense où il se trouve immanquablement quelqu'un pour commettre l'erreur fatale. L'horizon est sombre, bouché. « Il y a des manques, » a concédé Emerse Faé. « Où ? » lui fut-il demandé. « Partout… » a-t-il lâché. Cela fait beaucoup ! Il va falloir s'accrocher et améliorer les points positifs entrevus à Rennes. Pour l'heure, le FC Nantes est dans l'obscurité, il ne s'extirpe pas des sales draps où il vit une nuit de plus en plus en plus longue et qui vire de plus en plus au cauchemar. Défaites à l'extérieur, nuls à la maison, Roussillon lui-même a reconnu que la feuille de route n'annonce rien de bon.
Pas assez de talents
Nantes n'a pourtant pas livré un mauvais match à Rennes. A l'extérieur, on l'a même vu cette saison plusieurs fois davantage en difficultés. Mais il convient de rappeler que le Stade Rennais ne casse pas, lui non plus, trois pattes à un canard et que son potentiel offensif est à l'image de celui de Nantes : maigrichon. Alors, même si Georges Eo a noté des points intéressants au niveau du jeu, à juste titre d'ailleurs, il est difficile, dans les circonstances actuelles, de se satisfaire d'un match sans points. Difficile aussi d'admettre que dès lors qu'un but a été encaissé la défaite est irrémédiablement annoncée.
Japhet N'Doram avait dit la saison dernière que l'équipe nantaise manquait de caractère, nous pensions que c'était davantage la technique et l'inspiration qui lui faisaient défaut. Mais c'est en fonction de ses idées qu'il a recruté, massivement. On doute aujourd'hui qu'il soit satisfait. Le caractère n'est toujours pas là, collectivement s'entend. La technique, l'inspiration et le talent non plus. Et les buts encore moins.
Il reste encore du jeu
Le FC Nantes a la valeur d'une équipe de bas de classement de Ligue 1, peut-être de Ligue 2, c'est d'ailleurs le niveau de la plupart des joueurs achetés depuis un an. Le seul motif d'encouragement, d'espoir, est qu'il n'en a pas encore le jeu. Son entame de match sur la grasse pelouse du stade de la route de Lorient ne fut pas celle d'une formation taraudée par la frousse au ventre. Tant qu'ils n'eurent pas encaissé de but, et même après, les Canaris restèrent dans la partie, jouant souvent aussi bien, mieux même, que des rivaux dont les individualités sont, en revanche, sans doute supérieures.
Signorino et Payet effectuaient leur retour et Eo avait eu la bonne idée de titulariser enfin Dimitrijevic, l'un des rares capables de construire. Milos est peut-être un peu lent, un peu inconstant, sujet à des pertes de balle intempestives, mais il respire le foot. Il voit clair. Le coach nantais avait ainsi opté pour un milieu de terrain dense avec un trio Saidou (dans l'axe, en retrait), Faé (à droite), Dimitrijevic (à gauche) et, sur les côtés, Norbert et Payet.
Stojkovic commence par rassurer
Dans cette configuration, les Canaris ne maîtrisaient certes pas les événements, mais ils ne les subissaient pas trop non plus, bien que leur attaque ait été réduite la portion congrue et que Payet ait, dans un premier temps, peu vu le ballon. Rennes n'obtenait rien de tangible, si ce n'est quelques corners. Bien sûr, connaissant les lacunes des Jaunes en ce domaine, on ressentait une petite boule d'appréhension à chaque fois qu'Olivier Monterrubio les tirait mais Stojkovic affichait une certaine autorité. Cette fois, ses gants ne paraissaient pas de verre. En outre, Sorlin, parvenu seul devant lui, eut la bonne idée d'expédier un boulet dans les tribunes (15è) tandis que Cetto parvint à récupérer un centre de Moreira et de dévier la balle sur …Stojkovic (22è). Peu après, le gardien serbe se montra de nouveau à son avantage en se couchant sur un shoot de Moreira.
Tout allait bien et les Canaris avaient répondu par deux mouvements bien ficelés. Le premier amorcé par Keserü s'était achevé par un centre de Payet dont Keserü, qui avait poursuivi l'action, avait manqué la reprise de peu (15è). Sur le second, c'est à Dimitrijevic qu'il avait manqué quelques centimètres pour reprendre un centre de Cubilier.
Faé discute l'arbitrage
Nantes s'enhardissait et lorsque Faé s'enfonça dans la défense rennaise Faty freina sa course de façon peu orthodoxe (25è). Emerse trébucha, ne tomba pas, et décocha un shoot trop mou pour inquiéter Pouplin. Laurent Duhamel laissa jouer. Erreur flagrante aux yeux de Faé qui estime que l'arbitre ne lui laissa pas l'avantage, comme il le prétendit. « Ou alors, nous n'avons pas la même notion de cette donnée, » ajoute-t-il. Emerse se plaignit aussi du trop grand nombre de coups distribués par Faty en toute impunité (un seul carton jaune en fin de match), ce qui l'amena à refuser la poignée de main tendue par le Rennais lors de la rentrée aux vestiaires. « C'est trop hypocrite : cela consiste à faire croire qu'on est sportif alors qu'on a triché pendant toute la partie. » Vue sous cet angle, la position d'Emerse est tout à fait défendable et on comprend que le laxisme de Duhamel ne lui ait pas plu : « il parle trop, il ferait mieux de bien arbitrer, » tranche-t-il.
Il reste que si Duhamel n'est pas toujours impérial quand il s'agit de réprimer le jeu dur, Mauro Cetto, lui, n'a pas forcément à s'en plaindre. Car l'arbitre n'intervint pas davantage quand il s'interposa de façon suspecte face à Utaka, parti en contre attaque (28è). Or, l'Argentin se trouvait alors en position de dernier défenseur…
Erreur de Stojkovic et but
Vladimir Stojkovic, lui, avait vécu une assez bonne première période, c'est du moins ce qu'on pensait alors qu'on atteignait la 39è minute. Cette fois, on l'a écrit, il inspirait confiance. C'est alors que Monterrubio botta un corner. Saidou renvoya, de nouveau en corner. Monterrubio tenta sa chance une nouvelle fois. Signorino repoussa encore mais ce fut sur Monterrubio dont le centre constitua une aubaine pour Melchiot qui avait réagi beaucoup plus vite que Cetto. Stojkovic, lui, n'avait pas bougé, mystérieusement scotché au gazon. Il venait de briser d'un coup la bonne impression qu'il avait faite précédemment.
A l'autre bout du terrain Simon Pouplin exultait, sur le banc rennais Revault souriait. Pouplin est un jeune et bon gardien, il l'a déjà prouvé à Nantes en début d'année en stoppant un penalty. Revault est un remplaçant idéal : encore suffisamment efficace pour assurer un éventuel intérim, trop âgé pour susciter une concurrence malsaine. Un jeune formé au club, un vieux capable de le suppléer : Rennes a trouvé la bonne formule, on en est presque à se demander si ce n'est pas lui qui, maintenant, donne des leçons aux pauvres dirigeants nantais. C'est douloureux à reconnaître. Autrefois, le recrutement de Rennes faisait s'esclaffer toute la France, notamment quand il était mené par Pierre Blayo, roitelet de l'incompétence, sorte de grand frère de Roussillon. Rennes sortait son chéquier et présentait en grandes pompes Lucas, Tordo et quelques autres comme des stars. Et on riait, on riait. A présent….
La tête de Keserü
A présent, quand Nantes va à Rennes, il est mené 1-0, ce qui, toutefois, si on consulte les livres d'histoire, ne constitue pas vraiment une nouveauté. Malgré tout, les Canaris ne se découragèrent pas et comme les Rennais avaient décidé de miser sur l'attentisme, les meilleures occasions de la seconde période furent bel et bien nantaises. Un tir de Payet fut contré (47è). Une action Dimitrijevic – Keserü fut interceptée alors que le Roumain cherchait Norbert. Puis, sur un centre de Cubilier, Claudio Keserü, esseulé devant la cage, ne parvint pas à appuyer suffisamment sa reprise de la tête pour tromper Pouplin (57è).
On peut supposer qu'il s'est agi là de l'un des tournants de la rencontre. L'un de ces instants où tout peut basculer dans l'autre sens. « S'il avait disputé quatre matches de plus, peut-être que Claudio aurait marqué, » soupira Georges Eo plus tard. Eh, bien, dans ce cas, il faut faire joueur le Roumain de plus en plus souvent !
Pouplin décisif devant Norbert
Nantes, qui avait déjà mal négocié le premier virage, celui du but de Melchiot, venait de rater un nouveau croisement. Il manqua encore le suivant, le dernier. Sur un coup franc botté par Boukhari, lequel venait tout juste d'effectuer son entrée à la place de Payet (qu'il convenait sans doute de ménager), Guillaume Norbert plaça une tête qui aurait pu être égalisatrice. Sauf que Pouplin n'a pas, lui, des semelles de plomb et qu'il se trouvait déjà à la parade (73è). Le gardien rennais répondit encore présent quatre minutes plus tard sur un nouveau coup franc de Boukhari.
Ce fut l'ultime occasion des Nantais. Faé avait brisé sur le fil, devant Monterrubio, une contre attaque rennaise à la 68è minute, Cetto, lui, ne put empêcher une remise en retrait d'Utaka sur Bruno Cheyrou à la 80è. L'ancien Bordelais tenta sa chance à ras de terre, en coin, Stojkovic se détendit un poil trop tard, les carottes étaient cuites.
B.V. le 3 décembre 2006