Les mots nous manquent Fabuleux, sensationnel, formidable. Inouï, inoubliable. Exceptionnel, homérique, légendaire. Les mots nous manquent, c'est terrible une telle pénurie, au moment de parler de l'exploit réalisé par le FCK sur la pelouse du stade Jean-Bouin d'Angers. Le FCK n'a perdu que 2-0, en disputant à 10 la presque totalité d'une inoubliable rencontre. On imagine aisément Baptiste Gentili, sans doute le meilleur entraîneur de la décennie, parodier José Mourinho qui l'autre soir, alors que son équipe venait de s'incliner au Camp Nou, avait déclaré : « jamais une défaite ne m'avait procuré un tel plaisir, puisque nous sommes maintenant qualifiés pour la finale de la Ligue des Champions ». Jamais, pareillement, Gentili n'avait dû savourer un revers puisque le FCK, dorénavant, alors qu'il reste encore une journée à disputer, est sauvé. Quel exploit ! Le champagne a dû couler à flots dans le vestiaire où Monsieur K, pour une fois, s'était glissé afin de féliciter haut et fort sa troupe de vaillants guerriers. Il n'a certainement pas doublé la prime : il l'a triplée, voire quadruplée. Monsieur K est un génie, un grand expert du foot. S''il n'a pas son diplôme d'entraîneur, il faut que l'UNECATEF le lui donne très vite, d'office. Quant à ses capacités de président, on se demande bien pourquoi il n'a pas été élu meilleur dirigeant des deux siècles écoulés. Ce qu'il a accompli à Nantes, en trois ans, dépasse en effet l'entendement.
Un football primaire, sans construction, sans idées Monsieur K a donc réussi, il a emmené son club dans les bas-fonds de la Ligue 2. Il lui a évité la descente en National, sauf mauvaise surprise devant la DNCG, même si on sait que cette dernière ne frappe que les faibles. Il nous souvient de l'un des affidés de Monsieur K, un certain Pascal P, qui claironnait que le jeu à la nantaise était démodé. Ce qu'il ne sous disait pas, c'est que l'objectif à atteindre était d'effectuer un bond dans le temps de plus d'un demi-siècle et de revenir à un football primaire, sans construction, sans idées, pratiqué par une cohorte de mercenaires venus d'un peu partout, et même souvent de nulle part. C 'est exactement ça, le FCK aujourd'hui : une équipe sans âme, sans plan de jeu, sans avenir. Un peu comme le FC Nantes des années 1950. Mais alors que ce dernier avait eu la chance de croiser sa route avec celle de José Arribas, rencontre qui lui donna une autre philosophie, une autre envergure, un autre destin, le FCK, lui, va poursuivre son calvaire dans l'obscurité, puisque son guide, et ceux qu'il embauche, n'ont rien compris au football, surtout pas à celui qui a fait la légende des Canaris. Ce chemin cahoteux le mènera donc encore en Ligue 2 la saison prochaine, peut-être même qu'au sein du club il va se trouver des clairons pour affirmer que le FCK va jouer la montée. Ce ne seront pas les mêmes que l'été dernier, puisqu'un bon nombre d'entre eux sont partis, ce seront simplement leurs frères.
Pas de joueurs, pas de techniciens, pas de dirigeants, seuls les supporters... Le FCK n'a pas d'avenir, car les méthodes qu'il emploie, axées sur le commerce et le conformisme, nous l'écrivions déjà durant l'automne 2007, ne peuvent déboucher que sur des matches comme celui d'Angers. L'équipe fanion du FCK n'a plus rien : plus de joueurs, excepté sans doute Vainqueur, mais faites-leur confiance pour qu'il soit vendu, plus de techniciens, plus de dirigeants. Il lui reste encore des supporters, qui croient à un certain jeu, certaines méthodes, certaines valeurs. C'est bien. Mais quel peuvent être leur pouvoir, leur influence face à un roitelet détenant un pouvoir absolu ?
La culture footballistique est tombée bas Et puis, ne nous leurrons pas : il y a encore quelques mois, des sifflets retentissaient dans la Beaujoire quand ils criaient « direction démission ». Dans la société, dont le football est un miroir volontiers fidèle, on trouve toujours aisément une armée d'abrutis pour applaudir la victoire, quelle que soient les moyens utilisés pour l'obtenir. Et à cette époque-là, celle où les serviles du stade ne voulaient surtout pas emboîter le pas à la contestation, le FCK gagnait encore. Et nombre de spectateurs considéraient qu'un propriétaire possède tous les droits, y compris celui de démolir un chef d'oeuvre à coups de bulldozers, dès lors que ces derniers sont financés par son argent. Aujourd'hui, le FC Nantes n'est plus qu'un champ de ruines... On pourrait dire que les pro-monsieur K ont ce qu'ils voulaient, mais même pas : ils n'ont pas été suffisamment intelligents et avisés, pour percevoir qu'il n'existait pas d'autre issue. Ils ont suivi, bêtement, sans réfléchir. D'ailleurs la culture footballistique est tombée à un tel niveau qu'on se demande si l'Inter de Milan, tel qu'il est, tel qu'il joue, tel qu'il gagne aussi, ne serait pas de nos jours applaudi à la Beaujoire. Son football inspire le dégoût, il s'appuie sur les sentiments les plus vils, il abaisse les hommes, mais au nom du chauvinisme, du nationalisme, du profit, il y aurait assurément une frange de spectateurs prêts à s'esbaudir. Boomerang pour une équipe de combat Mais le FCK, même s'il est conçu sur un modèle assez semblable, encore qu'on n'ose tout de même pas comparer Massimo Moratti à Monsieur K, est loin, très loin de ressembler à l'Inter de Milan. Ce n'est qu'une équipe en errance, une troupe désunie, qui a fourni à Angers, revenons-y, un spectacle désolant. En quatre minutes, l'affaire fut classée. Le temps pour Rémi Maréval de commettre une faute sur Modeste. Il fut sanctionné d'un penalty, lequel n'avait rien d'anormal. L'arbitre décida en prime de le renvoyer au vestiaire, punition qui put paraître dure, mais il est difficile de reprocher à M. Lavis d'avoir appliqué le règlement. Après tout, il est payé pour ça et il nous arrive trop souvent de mettre en parallèle le laxisme des arbitres avec leur salaire pour en désapprouver un, lorsqu'il prend une décision qui défend le jeu. De même, le FCK étant une équipe excessivement physique, basant son football sur les duels et les combats, il n'y a guère lieu de la plaindre lorsque les méthodes prônées par ses techniciens se retournent contre elle. Quand un Maréval débarrasse la pelouse, le monde des artistes n'est pas en deuil. Et si les entraîneurs qui confondent le football avec la guerre pouvaient de leur côté dégager des bancs de touche, le ballon n'en tournerait que mieux. Dégager n'importe où, pourvu que ça aille loin Dans cet ordre d'idées, il est opportun de glisser quelques mots sur la prestation de Djilobodji. Il commet tellement de fautes qu'il peut se féliciter pour n'avoir écopé que d'un seul carton jaune. En outre, alors qu'on a évoqué les années 1950, il faut bien dire qu'avec lui on a l'impression de remonter encore plus loin dans le temps. Ces longs dégagements n'importe où, pourvu que ça aille loin, sont tout simplement dignes de la grosse Bertha. Laquelle, remarquez bien se montrait peut-être plus précise. Mais qui lui dit ou le laisse jouer comme ça ? Modeste transforma le penalty accordé par l'arbitre et Nantes se retrouva donc mené d'entrée. Bof, sans doute le scénario et le schéma de jeu auraient-ils été sensiblement les mêmes, sans ce contre-temps. Lejeune se replia au poste d'arrière gauche et Djordjevic se retrouva isolé aux avant-postes, situation qui au FCK est devenue relativement courante pour un attaquant. Darbion, lui, trottinait à contre-sens, adroit lorsqu'il avait le ballon, ce qui arrivait rarement, et paraissant tout faire pour éviter d'entrer en sa possession. La rentrée de Shereni, c'est pour préparer la saison prochaine ? Mais foin des procès individuels, c'est le collectif angevin que l'on vit le plus fréquemment. A la 37è minute, les locaux auraient pu creuser l'écart grâce à Modeste qui mystifia Djibolodji et adressa un centre en retrait sur lequel Charbonnier et Brunel trouvèrent le moyen de se gêner. Une minute plus tard, Kamenar sauva la mise de ses partenaires en repoussant un shoot de Diers. Le gardien nantais se trouva en revanche aux abonnés absents à la 47è minute, alors qu'il aurait dû intervenir face à Charbonnier. L'attaquant, angevin, peut-être hors-jeu, en profita pour doubler la note. On en resta là, la suite de la rencontre se révélant des plus inodores. C'est tout juste si on nota deux contres de Bekamenga qu'il ne sut pas mener à bien, à la fois par manque de technique et de fraîcheur. Le deuxième, amorcé par Vainqueur à la 81è minute, était le plus exploitable. En fin de rencontre, Gentili fit entrer Shereni à la place de Bekamenga (84è), sans doute pour illustrer l'une de ses récentes déclarations assurant qu'il faut commencer à préparer la saison prochaine. Et pourquoi pas la période 2015-2020 pendant qu'il y est ? On se demande bien où en sera le FC Nantes à cette époque-là. En attendant, le FCK sera en Ligue 2 en 2010-11. Allez, monsieur K, faites sauter les bouchons !
B.V., le 9 mai 2010
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