Rohr travaille désormais en paix Tantôt il était accroupi dans la zone qui lui était imparti, devant son banc, visage émacié, traits crispés, imperméable sombre. Tantôt il gesticulait, s'appliquant à intérioriser ses émotions. Voilà nous avons vu dans ses oeuvres Jean-Marc Furlan, le nouvel entraîneur du FCK. Oui, le FCK, car bien sûr ce n'est pas parce que le coach a changé que le FC Nantes et les valeurs qu'il incarne sont revenus. « Direction-démission », a-t-on encore entendu crier dans les tribunes et cette fois il n'y a pas eu de protestations des supporters basiques pour couvrir le slogan. La Résistance s'est faite entendre. Il est vrai que si une affluence un peu supérieure à 11.000 spectateurs a été annoncée, beaucoup (!) ont eu l'impression qu'elle était en réalité inférieure à ce chiffre. Il fallait méconnaître le football, on l'a souvent écrit, et dès le départ, pour croire que Gernot Rohr pouvait réussir à Nantes. La venue de cet ancien défenseur rugueux de Bordeaux appartenait à ces incongruités dont le président du club qui joue à La Beaujoire détient le terrible secret. « Laissez-nous travailler en paix », avait fait afficher par banderole l'ancien ennemi de Giresse, lors de l'un des entraînements de début de saison. Eh bien, son employeur a exaucé ses vœux : il peut maintenant bosser en toute quiétude et vérifier tranquillement le montant des indemnités qui lui ont été allouées pour cinq mois de présence à La Jonelière. On espère qu'il a su négocier et, remarquez bien, on ne lui reproche pas d'avoir touché ce jackpot. Le vrai responsable, c'est celui qui lui avait signé son contrat. Qu'il assume ! Nantes, copie de Strasbourg. Et vice-versa Jean-Marc Furlan, sur ce plan, ne va d'ailleurs pas donner tort à Rohr. Il a procédé de la même manière à Strasbourg, un club qui depuis quelques années ressemble tout à fait à Nantes. On se demande même si Ginestet, quand il se regarde dans un miroir, ne voit pas M.K. Et vice-versa. L'ex-président alsacien a simplement une longueur d'avance : il vient de revendre le Racing alsacien, à on ne sait pas encore trop qui. Il en avait marre de ne pas gagner malgré une intensive consommation d'entraîneurs, alors il a cédé l'affaire, empoché son chèque et au revoir messieurs-dames. Le sort de Strasbourg, franchement il s'en tape. Lorsque l'ancienne maire de Strasbourg avait bradé le club à Proisy et McCormack, « les Américains, disait-on là-bas », elle avait commis une erreur similaire à celle d'Ayrault quand il a conclu avec la Socpresse. Furlan, tiens un trait d'union supplémentaire entre les deux clubs, et son ancien président avait d'abord envisagé une séparation à l'amiable mais lorsque l'heure du divorce a véritablement sonné, l'ex-coach de Libourne, le club où il a le mieux réussi, s'est ravisé, estimant qu'on lui avait décoché tellement de coups bas qu'il lui semblait juste d'en présenter l'addition. Furlan vaut-il mieux que son prédécesseur ? On ignore si à Nantes il fera mieux que Rohr, alors qu'il reste sur deux échecs cinglants, à Strasbourg, on l'a dit, mais aussi, précédemment, à Troyes. Il a sans doute été marqué par ces revers, il a d'ailleurs souligné que sa première victoire avec les Canaris mettait du baume sur la plaie, encore ouverte, de sa dernière défaite avec Strasbourg, il y a six mois. Une défaite qui avait été synonyme de prolongation de séjour en Ligue 2 pour les Alsaciens. Et donc de fin de l'aventure pour lui. On est toutefois enclin à penser qu'il ne fera pas pire, même si ses méthodes sont assez conformistes. Dans ses discours, il parle souvent davantage de psychologie que de jeu, indice sans doute de certaines limites. Quand il officiait au stade de l'Aube, il se vantait d'ailleurs d'expédier ses joueurs dans un cabinet spécialisé où il avait ses habitudes. On avait l'impression, à l'entendre, qu'il venait de découvrir la lune. La méthode à l'arrivée n'a pas vraiment été convaincante, sans doute aurait-il mieux fait de penser d'abord au football. Croire au retour du foot avec cette direction est utopique Mais que voulez-vous : Nantes est en Ligue 2 et trouver un entraîneur soumis à la direction et qui serait capable, avec une armée de mercenaires venus de partout et même parfois de nulle part, de restaurer les valeurs maison relève de plus en plus de l'utopie tant le niveau d'ensemble des frileux techniciens français est limité, tant aussi les recherches de la direction font qu'il existe peu de chances que l'élu soit un technicien éclairé. On a davantage de risque de tomber sur un Baup, un Rohr ou un Furlan que sur le gros lot. Laurent Guyot, le dernier qui, ici, en tant que technicien, savait encore parler de football à la nantaise, a vu ce qu'il en coûte. Cela dit, et même si le match contre Arles-Avignon a été pauvre techniquement et dénué de véritable ambition de jeu, on a vu du mieux lundi soir. Les Nantais sont même parvenus à s'offrir un pourcentage de possession de balle respectable. Mais est-ce dû à la faiblesse des Méridionaux, à leur volonté de se contenter d'un partage des points, objectif claironné par leur entraîneur ? Ou à une réaction conjoncturelle des Canaris, résultant du changement d'entraîneur puisque certains dans l'effectif éprouvaient le désir de changement ? Ou est-ce l'indice d'une embellie à venir, au moins sur le plan des résultats ? L'avenir nous le dira mais avant de parler de réussite il faudra de toute façon se souvenir qu'il y a encore un mois et demi tout le monde voyait déjà le FCK revenir en Ligue 1. Même en jouant à la Gernot Rohr. Darcheville sur le banc Son écroulement avait coïncidé avec les déclarations intempestives de Jean-Claude Darcheville et il est possible que Furlan ait voulu marqué son territoire en demandant au Guyanais de commencer par astiquer le banc. On retiendra aussi que le retour en grâce de David De Freitas, on peinait d'ailleurs à comprendre pourquoi il était écarté, a été positif. L'ancien Amiénois a participé à toutes les bonnes actions, il a adressé la passe décisive à Darcheville et il a même paru, sur certaines séquences, être le seul à savoir jouer rationnellement au football. Sans doute aussi convient-il de ne pas omettre de préciser qu'à quatre minutes près ce n'est pas une victoire que nous serions affairé à commenter mais un simple et décevant résultat nul. De ne pas oublier non plus que les faits de jeu ont plutôt tourné à l'avantage des Nantais : l'Arlésien Maurice Dale a expédié un coup franc sur la transversale de Kamenar (25è) et l'arbitre a complaisamment fermé les yeux lorsque Marvéval, sur un autre coup franc, retint Dale par le maillot (58è). Un milieu en losange, avec des pointes latérales basses et des arrières latéraux passifs Sans Darcheville mais avec De Freitas et N'Diaye, le FCK entama la partie avec volonté et très vite Darbion, servi par De Freitas, mit Merville à contribution (4è). Mais cet élan initial dura peu, comme souvent, une dizaine de minutes, et progressivement le jeu nantais s'effrita. L'attaque était occupée par N'Diaye et Zerka, lequel prouva surtout qu'il sait défendre, alors qu'en milieu de terrain s'activaient Darbion et Ba, aux bases haute et basse d'un losange dont les côtés étaient De Freitas à gauche et Vainqueur à droite. Vainqueur éprouvait cependant des difficultés à trouver son positionnement, il ne s'excentrait pas suffisamment et comme les deux défenseurs latéraux, Maréval et surtout Tall ne montaient jamais, le système ne permettait pas d'inquiéter vraiment la défense arlésienne. C'est même Reynaud qui sur une tête arrière, se montrait le plus dangereux pour les siens. On notait encore une volée écrasée, du gauche, de De Freitas sur un centre de Vainqueur (33è) et une percée de Darbion ponctuée par un tir dans les bras de Merville (44è) et c'était la mi-temps. Elle était soulignée par un mini-concert de sifflets. Lesquels auraient été encore plus stridents si, comme on l'a précisé, la barre n'avait pas suppléé Kamenar sur un coup franc de Dale. Joli but De Freitas - Darcheville En seconde période, Vainqueur ajusta sa position, Maréval se montra un zeste moins timoré mais il fallut attendre le dernier quart de la rencontre pour voir Nantes se montrer un poil plus convaincant. Darcheville et Keserü avaient effectué leur entrée, le premier aux dépens de N'Diaye (58è), le second à la place de Darbion (74è) et l'escargot Arles-Avignon ne sortait pratiquement plus de sa coquille. Sur son premier ballon, Keserü, dont l'apport se révéla intéressant, expédia un coup franc que Merville repoussa vaille que vaille. Il décocha ensuite, grâce à une munition récupérée par Zerka, un bolide que le gardien arlésien ne put maîtriser. Darcheville surgit mais Esor parvint à le devancer et à mettre en corner (80è). Il restait quatre minutes quand De Freitas adressa une superbe passe à Darcheville. Au bon moment, au bon endroit. Le Guyanais amortit du droit et, du gauche, il plaça prestement le ballon entre Merville et le montant. C'était un joli coup, il vaut trois points et il permet à Nantes de rester à proximité de la zone de montée, deux longueurs derrière Brest et Metz qui se partagent la deuxième place.
B.V., le 9 décembre 2009
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