Les états d'âmes nantais |
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Par Tomsca
le 06/05/2001
Alors que deux rencontres décisives restent encore
à jouer pour l'attribution du titre de champion de
France, certains Canaris profitent déjà de cette
mini-trève pour livrer ici et là leurs états
d'âme... Décevant !
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Le dernier article parut à la une de FCNANTES.com soulignait
avec quelle rapidité les dirigeants nantais avaient opéré
pour conclure les transferts de Pierre-Yves André et dOlivier
Quint ("cette année nous avons pris les devants"
a déclaré le Président Bobin). Cette volonté
de ne pas vouloir laisser traîner les choses en a surpris
plus dun; à commencer par les supporters nantais (tous
ont encore à lesprit le recrutement très tardif
de lan passé *). Il est vrai quil fallait aller
vite car quelques clubs restés sur les rangs, se montraient
pressants: Bordeaux, Marseille, Sunderland et Glasgow Rangers pour
André; Valence, Liverpool, Tottenham, Lens, Monaco et Bordeaux
pour Quint; dautres allaient probablement se mettre en branle
en constatant lintérêt suscité par les
deux joueurs (on sait que certains présidents nhésitent
pas à recruter, non par souci de se renforcer, mais plus
par volonté daffaiblir un adversaire potentiel). Bravo
donc aux dirigeants nantais pour avoir enrôlé aussi
rapidement dans leur effectif deux garçons athlétiques,
techniques et dont le jeu semble correspondre avec celui pratiqué
sur les bords de lErdre. Ce que confirme Kléber Bobin:
"l'option physique est évidente car ce sont deux joueurs
de grande taille, et je crois surtout que ce sont deux joueurs qui
pourront s'adapter à notre style de jeu." Du reste,
les médias -en particulier la presse- ont largement salué
le "coup" nantais: les derniers articles consacrés
au FCNA étaient tous dédiés aux nouvelles recrues
(avec fiches techniques, statistiques et interviews à lappui).
Les journalistes soulignaient aussi la volonté nantaise de
vouloir préparer au mieux la future saison et en particulier
la Ligue des Champions. Hélas, cétait trop beau:
alors que se profilait un week-end radieux sur la Cité des
Ducs, les journaux locaux et la chaîne sportive "lÉquipe
tv" relayaient les états dâme de quelques
Canaris et ce, à une semaine seulement du grand match à
la Beaujoire contre les Verts
Premier joueur à ne plus se sentir indispensable à
la Jonelière: Olivier Monterrubio. Celui-ci paraît
plutôt amer: "je pense que lon ma trouvé
un remplaçant pour la saison prochaine ! (
) je pense
donc que jirai voir ailleurs
" Voilà qui
a le mérite dêtre clair. Mais les propos de lattaquant
nantais sont néanmoins surprenants. En effet, comment peut-on
à la fois avoir le désir dévoluer dans
un club ambitieux sans pour autant accepter la concurrence ? Il
faut être lucide, Monterrubio a réalisé une
saison très moyenne (avec de très bons matches certes,
mais aussi
de très médiocres !). Il a finalement
peu joué (puisque souvent blessé) et son niveau de
jeu sen est ressenti. Mais cest justement pour palier
les blessures, les méformes passagères ou les sélections
en équipe nationale que les dirigeants nantais désirent
doubler les postes en vue de la prochaine saison. Et cette volonté
denrichir leffectif tant qualitativement que quantitativement
est tout à leur honneur: le FCNA ne cache plus ses ambitions
-pour le plus grand plaisir de ses supporters- et cest là
une autre nouveauté. Le capitaine nantais Mickaël Landreau
sest dailleurs félicité des efforts consentis
en matière de recrutement (après ceux réalisés
pour améliorer les structures du club). Car cest une
réalité: les joueurs disputent de plus en plus de
matches et le turn over constitue bel et bien une composante essentielle
du football moderne. À ce propos Fred Da Rocha dit que "c'était
une bonne tactique
parce qu'elle a fonctionné. Le groupe
est étoffé et nous avons pu nous battre sur quatre
puis trois tableaux. Certains ont pu souffler"; un même
club doit donc pouvoir aligner pratiquement deux équipes
compétitives pour espérer jouer sur les quatre tableaux
(et à fortiori si la D1 revient un jour à 20 clubs).
Nantes a manqué le triplé puis le doublé faute
davoir pu instaurer un roulement suffisant. Et le discours
de Monterrubio ne tient pas: la notion de titulaire-remplaçant
est devenue obsolète. Ensuite, aucun joueur ne peut prétendre
aujourdhui évoluer dans un club pro en réclamant
une place de titulaire. Même un joueur brillant comme Trezeguet
est plus souvent sur le banc à la Juventus que sur la pelouse
! Et si Monterrubio quitte Nantes, sera-t-il pour autant titulaire
? Pas sûr
Les propos tenus par Quint après lannonce
de son arrivée à Nantes, tranchent avec ceux de Monterrubio:
"On nest jamais assuré de jouer, la concurrence
fait partie du métier (
), je consentirai les efforts
nécessaires pour gagner ma place sur le terrain, mais si
je ne suis pas bon on mettra quelqu'un d'autre à ma place."
Bel état desprit du néo-nantais ! Monterrubio,
sans doute déçu ne pas avoir été davantage
titularisé par Denoueix ("je souhaitais obtenir un temps
de jeu plus conséquent"), affirme: "je ne referai
pas une saison comme celle-ci." Peut-être; il nempêche
que le Football Club de Nantes Atlantique et Monterrubio (ne lui
en déplaise) ont de grandes chances dêtre champions
de France tous les deux ! Que faut-il donc souhaiter à un
joueur professionnel ? Jouer un match sur deux, pouvoir souffler,
et gagner des titres ou bien être titulaire à chaque
rencontre, risquer des blessures de fatigue, finir la saison "sur
les genoux", et finalement jouer la relégation ? À
en écouter certains, on se le demande
Monterrubio quittera-t-il
donc le FCNA ? Oui, si on sen tiend à ses dernières
déclarations; non, si on écoute les dirigeants. Car
il y a une condition sine qua non pour quun Canari obtienne
son bon de sortie: loffre doit être à la hauteur
des exigences du club. Or on ne se bouscule pas au portillon pour
acquérir les services du gaucher nantais (Monterrubio a un
temps été annoncé à Manchester City,
aujourdhui club de seconde zone, sapprêtant à
rejoindre la division inférieure
). Enfin, les propos
de Monterrubio doivent être nuancés: ses agents ne
sont sans doute pas étrangers à sa récente
prise de parole (ceux-ci ont intérêt à le voir
partir vers dautres cieux, ou à lui faire renégocier
son contrat avec le FCNA). Le natif de Gaillac veut-il mettre la
pression sur ses dirigeants ?
Lan passé, Antoine Sibiersky** avait quitté
Nantes car il jugeait le recrutement léger et trop tardif
à se dessiner. Les dirigeants ont retenu la leçon
et nont pas voulu renouveler la même erreur. Du reste,
des joueurs comme Éric Carrière, Stéphane Ziani,
Frédéric Da Rocha ou Mickaël Landreau (réfléchissant
pour continuer ou non leur aventure nantaise) se montrent emballés
par les arrivées de joueurs denvergure comme André
et Quint. Carrière déclare à ce sujet sur son
site internet: "Je pense que c'est une très bonne chose
pour le club. Il faut se renforcer pour jouer la Ligue des Champions
car de gros calibres y sont engagés. Cela risque de s'avérer
très délicat si nous ne recrutons pas de bons et sérieux
éléments." Ziani paraît enchanté
de retrouver André avec lequel il a évolué
à Bastia; et larrivée dun vrai demi-gauche
comme Quint lui permettrait de retrouver une place plus conforme
à son style de jeu. Da Rocha déclare à son
tour: "Pierre-Yves André est un super joueur. Il est
disponible pour ses coéquipiers et il possède un solide
gabarit. Quant à Olivier Quint, il fallait un tel gaucher
à Nantes." On constate donc que certains Canaris perçoivent
tous les aspects positifs de la concurrence. Heureusement ! Le manque
de concurrence à Sedan a d'ailleurs été un
facteur décisif dans le choix de Quint: " je n'en avais
pas pour progresser un peu, j'en avais besoin, ça fait toujours
avancer." Contrairement à Monterrubio, la rivalité
ne semble pas l'effrayer outre mesure. Landreau a aussi précisé
que recruter des joueurs de qualité peut savérer
être un facteur déterminant pour le convaincre de rester
une saison de plus sous le maillot jaune et vert; sentiment partagé
par Carrière lorsquil déclare: " (
)
cest donc une bonne chose pour le club et ça va sans
doute rentrer en compte dans ma décision à propos
de mon avenir." Voilà qui est rassurant !
Mais un autre reproche est formulé à lencontre
des dirigeants nantais: " le manque de communication"
avec leurs joueurs (Monterrubio sur lÉquipe tv); Carrière
-toujours sur son site internet (!)- renchérit: "Je
trouve dommage dapprendre par voie de presse les arrivées
dAndré et de Quint. Les dirigeants pourraient nous
informer avant, cest la moindre des choses. Nous sommes quand
même concernés !" On pourrait retourner la critique
à ces jeunes gens : il est dommage, en allumant sa télévision,
en naviguant sur Internet, ou en lisant la presse, dapprendre
leurs états dâme (légitimes peut-être,
mais mal venus à une semaine de disputer une rencontre capitale
pour le club). Un joueur de la stature de Carrière peut (on
limagine) aller discuter, sil en ressent le besoin,
avec Robert Budzynski ou Kléber Bobin (la Jonelière
nest ni Matignon, ni le palais de lÉlysée
!). Le reproche est dautant plus surprenant que les arrivées
de Quint et André nétaient plus un secret pour
personne depuis fort longtemps
Dautre part, et jusquà
preuve du contraire, le plus apte à juger le bien fondé
du recrutement, cest bien lentraîneur. Celui-ci
désirait fortement larrivée du sedanais: "Raynald
Denoueix ma dit quil était embêté,
quil avait dû déplacer cette saison Stéphane
Ziani, et que par conséquent, ce poste constituait sa priorité"
(Quint dans une interview accordée à Ouest-France).
Enfin, Carrière devrait savoir que les "grands"
clubs européens (Lazzio, Inter, Milan AC, Réal
)
ne sont pas vraiment des modèles de clubs "démocratiques":
aucun joueur nest jamais consulté et ne sait avec qui
il jouera la saison suivante (dans le cas où il est conservé
!). On imagine mal par exemple, un joueur du Milan ou de l'OM peu
satisfait du recrutement, aller se plaindre au président
Berlusconi ou Tapie
il faudra quÉric Carrière
change vite sa façon de raisonner sil désire
évoluer un jour dans ses clubs là !
À ce sujet, celui-ci a quelque peu changé son point
de vue: "Autant, au début je me disais que je prérérais
rester en France, autant aujourdhui ma réflexion a
un peu évolué. Je constate que pas mal de joueurs
sadaptent et simposent dans de grands clubs européens.
On sent quils ont franchi un palier. Je réfléchis
donc à tout ça en ce moment, je pèse le pour
et le contre." Les récents propos du sélectionneur
national Roger Lemerre ne sont sans doute pas étrangers à
cette soudaine évolution: celui-ci conseillait vivement à
Éric Carrière de rejoindre un grand club étranger
sil voulait espérer faire parti du "groupe France"
(merci pour Nantes, Roger !). Mais les propos les plus durs à
légard du FCNA restent à venir: "(
)
je me dis que pour franchir un palier, il faut peut-être que
jaille acquérir de lexpérience dans un
club mieux structuré que Nantes parce quil ne faut
pas se voiler la face
" et de continuer: "Nantes
nest pas actuellement le meilleur club, je le placerais aux
alentours de la cinquième place."
Que dire après cela ? Les paroles du "meilleur joueur
de la Division 1" à légard de son club
formateur sont déconcertants, inattendus voire choquants.
Effectivement, si Nantes avait été un club "mieux
structuré", sans doute n'aurait-il jamais fait attention
à lui lorsqu'il évoluait à Muret en Nationale
! Heureusement, il existe aussi au Football Club de Nantes Atlantique
des gentlemen comme Ziani, Landreau ou Da Rocha (pour qui: "quelque
soit ma décision, ce club qui m'a formé restera à
jamais dans mon cur.") Ceux-ci restent très discrets
quant à leur avenir et ont la délicatesse, la sagesse
de ne faire aucune déclaration fracassante ou blessante.
Car la saison est loin dêtre terminée. Eux l'ont
compris. Merci à ces joueurs là
* Si le recrutement fut tardif, force est de reconnaîte quil
fut néanmoins de qualité !
** Sibiersky a rejoint Lens car Nantes ne pouvait pas saligner
sur le salaire mensuel proposé par le RCL
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