Ils peuvent cocher la case : « se débarrasser du mutin Mickaël Landreau ».
Jean-Luc Gripond est là dans les couloirs de La Jonelière. Il est là dans son bureau de directeur général. Il jubile intérieurement : Landreau partira avant lui. Rudi Roussillon est dans le TGV, sa navette entre Nantes et Paris. Il coche la lettre de mission que lui avait fournie Serge Dassault dès sa nomination à la tête du club. Il n'a pas pu cocher la mention « vendre le club au bout d'une saison, après avoir redressé la situation, pour en obtenir un bon prix ». Par contre il peut dores et déjà cocher ce qui était écrit en gras : « se débarrasser du mutin Mickaël Landreau ».
Pure fiction évidemment, mais comment occulter l'idée que si Landreau s'en va, c'est aussi parce que Rudi Roussillon, faute d'arguments ambitieux, n'a pour l'instant vendu que du vent et aussi parce que Jean-Luc Gripond est encore en charge des destinées quotidiennes du club, derrière un Président à mi-temps. L'évidence est qu'on ne gère pas une PME à distance et de temps en temps. On n'instaure pas non plus un nouveau climat, on n'insuffle pas un nouvel élan en gardant aux manettes celui par qui le mal est arrivé. Celui dont Landreau, justement, avait demandé la tête, au grand dam de la profession offusquée. Laquelle ne nous rappelle pas qu'un dirigeant au bilan si désastreux, assorti d'une enquête pour emplois fictifs, aurait été viré dans n'importe quelle autre société. Pour reprendre une expression en vogue à cette époque et employée par Gripond lui-même.
Les langues vont-elles enfin se délier à propos de Gripond ?
FCNantais.com n'a cessé de le dire et Gripond nous a une nouvelle fois menacé de diffamation pour le coup : « il est là qui rôde et gangrène », « Il continue de régler ces mauvais comptes ». Alors on lit enfin dans la presse sous la plume de Jean-Yves Queignec (Ouest-France, Le Parisien) : « Landreau ne supporte plus la présence de Jean-Luc Gripond, l'ex-président toujours aux manettes », ou de celle de François David (But! spécial Nantes) : « Jean-Luc Gripond qui gère le club au quotidien ». Japhet N'Doram confirme « nous travaillons en équipe avec Serge, le Président et Jean-Luc Gripond ». On ne nous a pas crus lorsque nous insistions sur le rôle de Gripond, sur le mensonge de Roussillon, sur une presse prompte à l'auto-censure sur le sujet durant toute la saison. Où sont certains groupes de supporters sur ce sujet ? Traînent-ils les évènements de Sochaux, dont Gripond fut pourtant la principale explication et cible, comme Landreau a traîné quelque temps sa Panenka ? S'attaquer à Gripond, manifestement protégé, était-il donc si improductif ou si inopportun ? Le protéger, par contre, peut servir certaines ambitions, jusqu'à obtenir une place au sein du service communication du club.
Oui Gripond est toujours là, grassement payé et Denoueix n'a pas pu venir à l'intersaison, et Budzynski n'a pas pu rempiler, et Landreau va partir, et Toulalan ne restera pas, et ce ne sera pas tout… Evidemment ça n'est pas la seule explication du départ semble-t-il inéluctable du capitaine nantais. Si on insiste encore, si on se répète, c'est que l'on veut juste, une minute, que le lecteur-supporter puisse imaginer ce que serait le club, si Gripond n'était plus là, si Nantes avait un président actionnaire compétent et ambitieux…
Le départ de Landreau va attiser les divisions.
Ce dont nous sommes aussi certains et cela servira encore les desseins de cette insupportable direction, c'est que le sujet Landreau va diviser les supporters, c'est aussi que ceux qui désossent le club, ceux qui accumulent les déficits sans qu'on sache où tout l'argent de l'après 2001 est parti, vont se servir de cette division et l'attiser. En dehors de son rôle de gardien de but, on ne remplace pas non plus une personnalité si influente sans créer des dissensions. Déjà certains se placent. Certains qui n'en ont pas acquis de réelle légitimité sur le terrain.
Venez chercher Landreau, on vous le donne.
Sur le terrain, évidemment on se remettra du départ de Landreau. La vie footballistique est émaillée de départs crève-cœur. Et puis, le capitaine nantais avait déjà émis auparavant le désir de grandir dans un club plus ambitieux et plus exposé, avant de revenir. C'était d'ailleurs le sens de sa démarche lorsqu'il a proposé à Jean-Luc Gripond une baisse de salaire contre une diminution de sa clause libératoire et l'assurance d'une reconversion dans le staff nantais. Mais voilà, Jean-Luc Gripond, toujours un mauvais coup d'avance, a refusé. Rudi Roussillon qui a repris ce dossier au même titre que ceux de Mauro Cetto et Frédéric Da Rocha, n'a rien fait avancer. Normal il n'en a pas les moyens. Aujourd'hui, concernant le seul international français restant, on peut se demander s'il en avait juste l'envie.
Un ultimatum à la con
Alors que va-t-il se passer si Mickaël Landreau annonce qu'il part, qu'il annonce sa destination et la nature de son contrat, dès la fin du mois de mars comme l'a demandé son Président ? On se demande bien en quoi cela va avancer Rudi Roussillon d'avoir fixé cet ultimatum à la con et de connaître la réponse de son capitaine. Est-ce que ça l'empêche de prévoir un plan B ? Est-ce que cela sert le club et l'équipe de donner cela en pâture à la presse ? D'autres secrets sont pourtant jalousement gardés, pourquoi pas celui-ci ?
L'image du club davantage écornée que par l'article du Parisien
Au pire, nous voulons bien entendre : « désormais nous savons, l'un et l'autre, mais nous ne dirons rien avant la fin de la saison ». La presse pourra toujours écrire des papiers ou se vanter d'être dans le secret ou encore faire courir des bruits sur le nom de son éventuel successeur. Il y aura de l'argent pour tout le monde. Ah non pas pour le club, hormis l'économie d'un toujours gros salaire. Car s'il y en a qui doivent passer pour des guignols ce sont bien nos dirigeants. Et ce cher Gripond en particulier, lequel a autre fois ergoté pour quelques dizaines de milliers de dollars et qui sur ce coup là, fait perdre au club quelques millions d'euros. A coté de ça Rudi Roussillon nous vend une neuvième place comme obligatoire pour nourrir l'ambition de la saison prochaine... Mais sans doute Gripond ne voulait-il pas prendre le risque que Landreau reste faute de preneurs, à un montant à hauteur du talent du capitaine du FC Nantes. Bien vendre et bien acheter, ça il ne sait pas faire. Pour un apprenti financier, entiché de « foot business », c'est un comble.
Serge Le Dizet : « Le climat actuel est tout sauf ambitieux »
Oui, nous aimerions tant que Landreau ne dise rien. Qu'il ne leur fasse pas ce plaisir. Qu'il les fasse mariner jusqu'au dernier moment. Ce ne saurait être au détriment de l'équipe bien au contraire. Quand les joueurs ne parlent que de « boulot effectué » après leur belle qualification au dépend de Dijon, quand on observe leur grise mine dans les vestiaires après le méritoire nul obtenu au Mans, quand Toulalan n'y est plus, se chamaille avec Olivier Quint « le messie », et rentre au vestiaire la tête en bas après un 3-0, on a compris que le mal est fait. Serge Le Dizet enfonce le clou et renvoi Roussillon à sa démagogie : « Le climat actuel est tout sauf ambitieux. Il est même lourd pour nous. Les médias, les supporteurs et même les joueurs s'interrogent sur l'avenir du club, le devenir de l'équipe, le départ ou non de certains cadres... Tout ceci pèse dans une dynamique de groupe. Il faut réussir à canaliser tout ça. » On voit que l'appel à la fierté n'a servi qu'à épater les médias et les crédules. Les joueurs font le métier car il est difficile d'être fier de ce qu'est devenu le FC Nantes, car il est difficile d'y croire un an de plus.
La victoire de Gripond
Alors les spectateurs pourront toujours siffler et dire que parce qu'ils sont bien payés, les joueurs n'ont pas droit aux états d'âme. Les journalistes pourront toujours leurs taper dessus, la différence de salaire ça les gangrène au quotidien eux aussi. Le mal est là et, on le répète, on sait d'où il vient et ça fait 4 ans que ça dure ! Et pourtant, si Landreau s'en va, nous espérons encore secrètement qu'il restera, s'il le dit déjà et s'il annonce sa destination (comment pourrait-il dire qu'il va au PSG, comme annoncé, alors que les Nantais pourraient retrouver les Parisiens sur leur route en coupe ?) nul doute que quelques idiots le siffleront. Et en tribune Jean-Luc Gripond savourera sa victoire totale, une coupe de champagne à la main…
Frédéric Porcher, le 23 mars 2006.
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