Nantes à l'honneur |
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Par Tomsca.
le 01/05/2001
Que ce soit Eric Carrière dans le rôle de
meilleur joueur de première division, Raynald Denoueix
dans celui de meilleur entraîneur ou Nicolas Berson
pour le titre de meilleur espoir, tous trois concouraient
pour l'oscar de meilleur joueur de sa catégorie...
retour sur une soirée primée.
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Le dimanche 29 avril 2001 restera longtemps gravé dans le
cur des amoureux du Football Club de Nantes Atlantique. Les
récompenses décernées lors des "Oscars
du Foot" à Éric Carrière et Raynald Denoueix
-élus respectivement meilleur joueur et meilleur entraîneur
de la division 1- sont venues clôturer une journée
déjà bien engagée après la victoire
décisive acquise quelques minutes plus tôt face à
Troyes. Dimanche soir, c'est le FCNA qui a été couronné,
en attendant la récompense ultime
le titre de Champion
de France !
La traditionnelle cérémonie organisée par
la chaîne cryptée s'est déroulée à
l'Olympia. Tous les acteurs importants du football français
étaient présents; tous sauf
les nantais et leurs
homologues troyens en raison de leur opposition décalée.
Ceux-ci ont d'ailleurs débuté la rencontre plus tôt,
libérant ainsi le "prime time" pour la remise des
trophées. Les joueurs ont donc suivi la cérémonie
en duplex du stade de l'Aube. Certains supporters nantais qui avaient
fait le déplacement à Troyes ont profité de
la pause repas d'après-match et des cafés du centre-ville
pour suivre avec attention la cérémonie. Sans en manquer
une miette!
La consécration d'Éric Carrière n'était
plus un secret: depuis près de deux jours la nouvelle était
officieuse. Dimanche, les supporters nantais en chemin pour l'Aube,
ont donc pu se délecter (et passer le temps !) en lisant
dans le car les nombreux articles dédiés à
leur milieu de terrain favori. Tous étaient fiers de voir
les feux des projecteurs se braquer sur l'un des personnages les
plus discrets du football français. Enfin son immense talent
allait être (re)connu dans tout l'hexagone et enfin le "jeu
à la nantaise", dont il est un des symboles, allait
être récompensé ! Cette distinction est d'autant
plus gratifiante, qu'elle émane de ses pairs et non des journalistes
Voilà une nouvelle qui mettait un peu de baume au cur
à des supporters nantais que l'on sentait légèrement
crispés après la victoire lyonnaise acquise la veille
en terre lilloise.
On mesure aujourd'hui le mérite de celui qui a été
refusé des sections sports études a deux reprises
(à cause de ses capacités physiques jugées
insuffisantes !). Se hisser au plus haut niveau ne fut pas simple
En particulier lorsqu'il arrive de Muret (club de Nationale) au
FCNA en 1995: il est alors âgé de
22 ans (!)
et ne signe qu'un simple contrat de stagiaire 2ème année
(!!). Il doit commencer par s'entraîner avec le groupe des
moins de 17 ans. Un jour, un vieux supporter traînant du côté
de la Jonelière se permet même de lui déclarer:
"22 ans ?!!! C'est foutu pour toi, tu es beaucoup trop vieux,
tu ne seras jamais pro !". Cette remarque blesse Éric,
mais il va s'accrocher.
Il joue vite en N2 avec un certain Denoueix comme entraîneur.
Il n'aspire alors qu'à une seule chose: rentrer dans le groupe
pro entraîné par Coco Suaudeau. C'est chose faîte
en juin 96; il signe dans la foulée son premier contrat professionnel
d'une durée de 3 ans. Mais les contacts avec le coach sont
difficiles (étonnant non ?). Suaudeau croit-il en Éric
? Difficile de le savoir; en tout cas, Nantes a un temps envisagé
de le prêter à un club de D2
Il est vrai que
le disciple de José Arribas n'est pas tendre avec le petit
milieu de terrain: Éric est souvent malmené devant
le reste du groupe (ce qu'il supporte très mal). On frôle
parfois le clash. Morceau choisi. Suaudeau: "Alors, tu as des
clubs ?"; Éric: " Oui, j'ai Nantes !". Bien
répondu: le joueur a autant de caractère que son entraîneur!
Néanmoins, malgré ses efforts, il n'arrive pas à
figurer parmi les "seize"
Robert Budzynski, lui,
croit toujours en celui qu'il est allé chercher dans le Sud
Ouest. Les mois passent et Suaudeau, lassé du métier,
démissionne de son poste; Denoueix le remplace. Tout va à
nouveau vite changer pour Éric: il fait aussitôt parti
de l'équipe première et ne la quittera plus jamais.
Aujourd'hui, il est une figure emblématique du club, constitue
un véritable modèle pour tous les jeunes apprentis
footballeurs et incarne à merveille l'esprit nantais. Du
reste, les couleurs choisies par les fondateurs du club lui vont
à ravir. Le vert pour l'espérance: il ne s'est jamais
découragé et n'a jamais renoncé; le jaune pour
la réussite: son ascension dans le monde du ballon rond est
fulgurante.
Pouvait-il réussir ailleurs qu'à Nantes ? Probablement
pas: il est arrivé sur le tard dans le monde professionnel.
Quel club -autre que Nantes- est aujourd'hui capable d'engager puis
de donner sa chance à un joueur âgé de 22 ans
provenant de Nationale ? Et savoir qu'un excellent joueur de football,
passé au travers des mailles de la détection, peut
réussir une aussi brillante carrière (!) est plutôt
réconfortant à l'heure où les futurs champions
se repèrent dès l'âge de 13 ans. Il faut aussi
reconnaître tout le talent de Monsieur "Bud" pour
avoir déniché ce joueur, lui avoir laissé le
temps d'éclore et ne pas avoir douté de ses qualités.
Grâce à lui, le petit monde du foot et Éric
Carrière se sont rencontrés et ne se sont plus quittés;
pour le plus grand bonheur du public de la Beaujoire.
Au petit jeu des pronostics, beaucoup de supporters nantais présents
à Troyes, plaçaient l'ancien buteur des Canaris, Vahid
Halilhodzic, comme favori au titre de meilleur entraîneur
de division 1. Ce fut donc une agréable surprise d'apprendre
le plébiscite de l'entraîneur nantais Raynald Denoueix
par l'ensemble de la profession. Là encore, la distinction
est revenue à l'un des entraîneurs les moins médiatiques
de la scène footbalistique.
Pourquoi lui ? Sans doute parce qu'il représente le sérieux,
la rigueur et la droiture. C'est un homme respectueux et respecté:
jamais un mot de travers, il ne cherche jamais à polémiquer,
ni à mettre de l'huile sur le feu. Peu de chance donc avec
lui d'obtenir des déclarations tonitruantes. Denoueix est
avant tout un éducateur. Il a véritablement commencé
sa carrière d'entraîneur comme responsable de la formation
nantaise en 1982. En 1997, il remplace Coco Suaudeau et à
son tour essaie d'insuffler sur le club l'esprit inspiré
par son ancien entraîneur José Arribas.
Mais quel est-il cet esprit ? Il consiste à jouer en privilégiant
la technique, l'intelligence et le bon esprit (Arribas préférait
perdre plutôt que trahir ce principe) tout en s'appuyant sur
le collectif, le mouvement perpétuel et la volonté
d'attaquer. Quarante ans plus tard, ce sont les mêmes notions
que les jaunes essaient de développer lors de chaque journée
de championnat.
Autre point commun avec Arribas: la volonté de se rattacher
au jeu et seulement au jeu, même lorsque les résultats
ne sont pas ceux espérés. Ainsi, lors de la saison
1999/2000 les Canaris peinent et sont proches de la relégation.
Denoueix est convaincu que le salut viendra de ce que ses hommes
savent le mieux faire: jouer. Pour beaucoup, le discours du coach
nantais semble inadapté à la situation critique (aucun
discours prônant la prudence défensive, l'engagement
physique ou l'expérience -pour ne pas dire la tricherie-).
Mais Denoueix ne faiblit pas: défendre, c'est jouer contre
nature et cela risquerait d'aggraver la situation; le maintien des
jaunes lui donnera raison.
On se souvient encore du début de saison chaotique des Canaris.
Malgré la bourrasque (certains supporters réclamaient
sa tête !), l'entaîneur nantais a continué selon
ses idées; avec le résultat que l'on sait
Quant
on s'intéresse aussi à son palmarès, on constate
qu'il a de l'allure -surtout pour un entraîneur encore relativement
jeune !- Ainsi, de 1966 à 1979, période durant laquelle
il évolue comme défenseur au FCN , il a remporté
trois titres de Champion de France et une Coupe de France. Depuis
trois ans qu'il est entraîneur, il a déjà remporté
deux Coupes de France et est en passe de conquérir le titre
de Champion (on croise les doigts !!!).
Il est vrai que le respect du métier d'entraîneur
est une caractéristique nantaise: seulement cinq entraîneurs
se sont succédés lors des quarante dernières
années (c'est environ le nombre d'entraîneurs qui ont
dirigé l'OM sur les trois dernières saisons !). Autre
statistique en consultant le classement de cette 32ème journée:
les sept dernières équipes du championnat sont celles
qui ont changé d'entraîneur. La stabilité nantaise
du poste est certainement enviée par beaucoup de collègues
de Raynald Denoueix
Enfin un mot sur Mathieu Berson. Il était en lice dans la
catégorie meilleur Espoir de division 1. C'est finalement
l'attaquant lyonnais Govou qui a été élu .
Il est vrai que les (rares) apparitions de ce joueur ont souvent
été spectaculaires et décisives; elles ont
marqué les esprits même si le joueur de Santini a assez
peu joué cette saison. Le rôle de récupérateur
de M. Berson est beaucoup plus obscur et permet rarement de briller.
Il demeure néanmoins essentiel. Consolation: Mathieu fait
parti de l'équipe type de la division 1! Son énorme
travail au milieu de terrain est donc bien reconnu par ses pairs
et c'est là l'essentiel.
Superbe soirée donc qui distingue trois Canaris et qui à
travers eux, récompense tout le collectif nantais. Cette
soirée en appelle une autre beaucoup plus belle encore; une
soirée illuminée par une huitième étoile!
PS: pour les malheureux n'ayant pas pu obtenir de place pour le
dernier match à la Beaujoire contre Saint-Étienne,
un écran géant sera probablement monté sur
l'île Gloriette. Ambiance garantie!
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