Eo : « C'est un très bon point »
On est loin du compte. A Sedan, il n'y a pas eu de larmes, c'est au moins ça, et le point ramené des Ardennes a été accueilli avec un plaisir évident par des joueurs qui ne l'ont assurément pas volé et ont cru percevoir dans ce résultat positif l'annonce de jours meilleurs. A la question, « c'est un bon point ? », Georges Eo a même fourni une réponse en forme de rectificatif : « c'est un très bon point. »
Il suffit de consulter le classement pour se rendre compte qu'il s'agit d'une évidence. En cas de défaite, Nantes aurait été doublé par les Ardennais, il serait retombé dans les extrêmes bas fonds et serait de nouveau aujourd'hui la proie des plus grands doutes. Nantes a donc échappé au pire. Mais que ce fut dur ! Que les ultimes minutes furent longues et laborieuses ! Et comme on a bien perçu, une fois de plus, que la route qui conduit au salut sera parsemée d'ornières.
Un édifice fragile
Les Canaris vont mieux, sur le plan psychologique du moins, Franck Signorino s'est plu à le souligner, « on est resté sur la dynamique de notre victoire sur Monaco, » a-t-il dit. Ils se sont battus, « on s'est comportés comme des guerriers » a encore déclaré l'ancien Messin, expression que l'on goûte d'ailleurs modérément quand on parle football et tant on devine que la guerre, tout de même, c'est autre chose. Mais comme l'édifice échafaudé par Georges Eo demeure fragile, comme les solutions offensives restent réduites, comme les mouvements construits et les occasions de buts sont rares !
Sedan n'est pas un stade où on peut faire de la dentelle
Cela dit, Sedan n'a jamais été un stade, Louis-Dugaugez aujourd'hui, Emile-Albeau hier, où, à moins d'être très, très forts, dans sa technique et dans sa tête, il est recommandé de se présenter en casoar et gants blancs. La légende des « ardents Ardennais » s'est écornée au fil des saisons, il n'en demeure pas moins que les Sedanais possèdent toujours le chic pour rentrer dans le chou de leurs adversaires et leur faire sentir la douceur de leurs crampons. Surtout quand leur volcanique président a sonné le tocsin au cours des jours précédents et leur a rappelé, en tapant du poing sur la table, que c'est avec son argent qu'il les paie. Contre un tel rival, soit on fait courir le ballon à terre, en le maîtrisant mais en sachant qu'on prend des risques, Nantes s'y essaya quelquefois, notamment par Saidou, Faé et Rossi; soit on tombe plus ou moins dans son jeu, en s'évertuant à résister, vaille que vaille, et à ne pas se laisser monter sur les pieds. Dans l'ensemble, surtout en fin de rencontre, c'est plutôt vers la seconde solution que les Nantais inclinèrent.
Briant a brillé
Il n'est pas surprenant dès lors qu'ils aient peiné. Le premier quart d'heure fut même assez pénible car les Ardennais, encore en possession de tous leurs moyens physiques, s'évertuèrent à faire pression sur une défense dont ni la qualité de relance ni la sérénité ne constituèrent les points forts A peine renvoyés, souvent mal, les ballons revenaient et les fautes se multipliaient. Heureusement, les Sedanais se montraient plus agressifs qu'adroits, à l'image de Boutabout, et si les ballons volaient devant la cage de Vincent Briant le gardien nantais ne déplorait aucun dommage. On notera que depuis son intronisation au poste de titulaire il n'avait pratiquement jamais été autant à l'ouvrage. Il s'en est remarquablement tiré, apportant ainsi la preuve qu'en lui faisant confiance Eo a effectué le bon choix. Son intervention la plus décisive de début de rencontre fut une sortie au pied devant Boutabout (10è) . Il se distingua encore en détournant en corner une tentative à ras de terre de Pujol, consécutive à un ballon égaré par Guillon (28è).
Une relance déficiente
Nantes jouait groupé, toutes lignes resserrées, avec Wilhelmsson et Payet revenant volontiers en arrière, et peu à peu, s'appuyant sur Faé et surtout Saidou, promu capitaine, il mit le nez à la fenêtre. Tous deux se montraient actifs, ils alternaient et faisaient plutôt bon usage des ballons qu'ils récupéraient. Julio Rossi se montrait également à son avantage, il bougeait, voyait des ballons et s'il s'était mieux accordé avec Faé, l'un des deux aurait pu tenter sa chance (25è). Franck Signorino en revanche éprouvait quelques difficultés pour son match de rentrée mais ce n'était rien par rapport à Eric Cubilier, souvent débordé, et qui, quand il se hasardait à monter, se comprenait mal avec Wilhelmsson. Le Suédois faisait apprécier, comme il en a l'habitude, son habileté technique, sans parvenir toutefois à la rendre particulièrement efficace au niveau de la collectivité.
Payet marque sur le premier tit cadré
Il reste que Nantes, après une entame délicate, était bien revenu dans le match et à l'approche de la pause il asséna un but que les Ardennais encaissèrent comme un coup de poignard. Au départ de l'action, il y avait une faute, une de plus, sur Diallo. Le coup franc fut joué rapidement, Rossi parcourut quelques mètres le ballon entre les pieds et il adressa une belle ouverture à Dimitri Payet, sur la gauche et dans le dos de Ducourtioux. Amorti de la poitrine, shoot : le jeune attaquant nantais ne laissa pas le temps à Regnault de bien percevoir ce qui arrivait : le ballon gisait au fond de ses filets.
Côté ardennais, on ne manqua pas de souligner le haut facteur de réussite des Canaris. « C'était leur premier tir cadré, » murmurait-t-on dans les travées du stade. Eh oui : et le premier but ! Pour un peu, les Sedanais auraient presque regretté de ne pas posséder un gardien comme Vincent Briant.
Rossi et Wilhelmsson à deux doigts du KO
Patrick Regnault, qui ne semble pas particulièrement en réussite ces derniers temps, signa toutefois deux beaux arrêts en début de seconde période. D'abord face à Rossi, servi par Diallo qui avait bénéficié lui-même d'une belle ouverture de Cubilier (comme quoi tout arrive). Le mouvement était joli, il est dommage que l'Argentin n'ait pas davantage appuyé son tir (50è). Christian Wilhelmsson hérita de la deuxième occasion de réaliser le KO. Alerté par Rossi, il repiqua de la droite vers le centre et voyant que nul ne l'attaquait il testa sa frappe. Trop molle : Regnault stoppa le ballon.
Le bonjour de Pujol
On atteignait l'heure de jeu et trois minutes après les Canaris se mordirent les pattes pour n'avoir pas su exploiter ces deux situations propices. A la réception d'un centre de Lachor, Grégory Pujol se montra plus prompt que Guillon et, de près, il trompa Briant.
Ce but égalisateur signé par le Vosgien contre ses anciennes couleurs était son troisième de la saison. Il remit ses coéquipiers en selle car à partir de cet instant la partie changea de physionomie, elle tourna délibérément à l'avantage des Ardennais dont la pression s'intensifia au fil des minutes. Sur le flanc droit de la défense nantaise, Cubilier était souvent débordé et Georges Eo opta pour la prudence en décidant de jouer le nul. Un point pris vaut mieux que trois tu l'auras !
Prudence en fin de rencontre
Le coach nantais remplaça d'abord Payet par Capoue puis Rossi par El Mourabet, optant ainsi pour une défense à cinq et un milieu renforcé. C'est ce qui s'appelle annoncer la couleur. Il faut dire que, côté sedanais, Pasqualetti avait lancé Maurice-Bellay, un attaquant, à la place du défenseur Lachor. Les changements nantais n'apparurent pas spécialement judicieux car Capoue se montra brouillon et El Mourabet trop nerveux, ce qui l'amena à commettre plusieurs fautes inutiles. En outre, il n'existait pratiquement plus de possibilités de contres, tant Diallo désormais était esseulé. C'était du 5-3-1(Wilhelmsson),1 (Diallo). On avait même l'impression parfois que les Canaris n'étaient plus que dix tant le jeu se déroulait dans leur camp et tant il leur fallait échopper et se multiplier pour colmater les brèches.
La fin accueillie comme une délivrance
Par chance, la domination des Ardennais demeura aveugle et leurs longs ballons aériens ne surprirent pas les défenseurs nantais. Il manqua quelques centimètres à Pujol pour reprendre un ballon qui passa dangereusement devant la cage de Briant (78è) et Belhadj se montra maladroit (80è). Nantes pliait. Il ne rompait pas. Il se défendait bec et ongles, accroché à son butin comme le lierre à la muraille. L'arbitre donna cinq minutes d'arrêts de jeu, elles furent d'autant plus interminables qu'il en fit jouer six, Oliech ayant, il est vrai, remplacé Diallo pendant qu'elles s'écoulaient au goutte à goutte. La fin fut accueillie comme une délivrance par les Canaris qui, à l'heure des commentaires, apparurent même revigorés. Mais si Nantes a arraché un point précieux sur une terre inhospitalière, (encore que ce soit le cinquième nul concédé par Sedan à domicile), il faut bien admettre que le visage qu'il a montré est d'abord celui d'une équipe qui bataille pour sa survie. Mais après tout, n'est-ce pas la difficile et triste réalité du moment ?
B.V, le 6 novembre 2006.