Savinaud dans le but
Oui, on pourrait sourire et se dire par exemple que Nicolas Savinaud a dorénavant occupé toutes les places possibles, y compris celle où il est assurément le moins adroit, entre les poteaux. On n'en a pourtant pas très envie tellement le gâchis a été grand, tant aussi le spectacle a été pauvre. On peut en effet considérer qu'il est difficilement pardonnable de ne pas gagner un match quand à 10 minutes de la fin on mène 1-0 et que l'équipe en face se trouve d'une part en infériorité numérique, d'autre part avec un gardien de fortune dans sa cage. Ne pas réussir à exploiter pareille aubaine, pire se laisser rejoindre, indique clairement qu'on a fait preuve à la fois de suffisance, de naïveté et en tout cas d'un manque cruel de discernement.
Quelle occasion gâchée !
Autant de défauts qui en football se paient cher. Nantes tenait entre ses pieds une occasion en or de se projeter dans la première moitié du classement et d'assurer son maintien de façon définitive, comment s'y est-il pris pour la laisser échapper ? Troyes est aujourd'hui à 7 points des canaris, il devrait être à 10 et Serge Le Dizet pourrait préparer sereinement les voyages de Lyon et de Saint-Etienne et les réceptions de Paris et de Lille. Quatre matches périlleux et allez savoir si dans un mois les Nantais ne se mordront pas les doigts pour avoir fait preuve d'une telle nonchalance face aux très faibles Aubois, assurément l'une des plus tristes équipes du championnat.
Troyes s'entend pour défendre en se massant devant le but de Le Crom, il ne sait en revanche pas attaquer, il avait en outre perdu deux joueurs sur blessure en première période, dont Grax qui semble être son fer de lance le plus acéré. Bref, Nantes avait tous les atouts en poche, il n'avait plus qu'à donner une toute petite tape sur la tête des Troyens et ils auraient irrémédiablement coulé. Une action un peu construite, un petit tir bien ajusté et le tour était joué. Les Canaris ont été incapables de saisir l'aubaine.
Laborieux, imprécis, individualistes
On ne peut même pas invoquer le manque de chance. C'est tout simplement parce qu'il n'a pas eu les idées suffisamment claires et qu'il a été incapable de forcer ses talents et son destin que Nantes est resté en rade. Nantes n'a pas aligné de véritable meneur de jeu, Da Rocha n'étant pas fait pour ce rôle-là. Alors, ses actions construites ont été trop rares, son jeu beaucoup trop long et donc imprécis, ses enchaînements trop calculés et trop lents et orientés de surcroît souvent à contre-courant, c'est à dire vers l'arrière quand il fallait les enchaîner vers l'avant.
Ce fut donc longtemps un mauvais match même si Nantes avait assez bien débuté. Mais il fallut attendre la 10è minute pour voir un premier shoot de Diallo et ensuite on n'eut plus grand chose à se mettre sous les pupilles. Les Canaris se montraient laborieux, imprécis et souvent individualistes, à l'image de Bamogo. Capoue effectuait des raids qui ne débouchaient sur rien, sinon des plongeons sur la pelouse et qui n'avaient en tout cas qu'un lointain rapport avec les caractéristiques de la maison jaune. Capoue est sans doute plein de volonté, il dispose d'un réel volume de jeu, il a progressé mais il ne sent ni ne respire vraiment le football. Et sa qualité de centre laisse vraiment à désirer, lacune tout de même assez embêtante pour un joueur qui évolue excentré… On se demande d'ailleurs à partir de quels critères il avait été préféré à Rossi. L'Italo-argentin a assurément les idées plus claires et les pieds plus justes. Il n'est peut-être pas en grande condition mais ce n'est pas en le laissant sur le banc qu'il va l'acquérir.
Une seule action d'éclat
Si on y réfléchit bien on ne vit en première période qu'une seule manœuvre susceptible d'enflammer un stade et de mettre le feu dans une défense, ce fut un mouvement Bamogo, Da Rocha, Diallo, avec une remise en retrait de ce dernier à Da Rocha (29è). Le shoot de Fred passa au-dessus. A part ça ? Eh bien un centre de Bamogo sur lequel Da Rocha s'avéra un poil trop court (22è) et un shoot de Capoue bloqué par Le Crom (39è). Rien d'autre. C'était peu, trop peu. Les Troyens, eux, avaient perdu Grax et Paisley, tous deux en délicatesse avec leurs muscles, et ils comptaient deux joueurs avertis, Amzine et Adam. De quoi laisser supposer que la seconde période serait délicate pour eux. Elle le fut effectivement, puisqu'il leur fallut subir l'emprise nantaise. Le problème est que cette dernière ne se matérialisa pas par des actions d'envergure. Certes, on nota une indéniable amélioration après les entrées en jeu de Rossi (55è) et de Keserü (65è) aux places de Capoue et de Da Rocha mais c'est essentiellement sur des coups francs que Nantes se montra dangereux. Celui de Guillon s'envola dans les tribunes (56è), celui de Savinaud fut joliment détourné en corner par Le Crom (62è).
Le Crom expulsé et but de Keserü
Une attaque Keserü – Diallo déboucha sur un tir de ce dernier et un nouvel arrêt, en deux temps, de Le Crom (67è), un shoot de Bocundji Ca passa au-dessus (68è) et on s'aperçut que le dernier quart d'heure était en vue, alors que deux zéros bien pointés s'affichaient toujours sur le tableau de La Beaujoire. Jean-Marc Furlan, le coach troyen, procéda à son troisième et dernier changement en remplaçant Adam par Bangoura, histoire d'apporter un peu de sang neuf à sa défense et d'éviter au sortant un possible deuxième carton jaune.
Le scénario s'accéléra peu après. A la 74è minute, Diallo et Le Crom se précipitèrent vers un ballon dont ni l'un ni l'autre ne purent s'emparer. Ils étaient à la limite de la surface de réparation et l'attaquant nantais plongea. Avait-il été réellement touché ? Les images montraient qu'il ne s'agissait pas d'une évidence, bien au contraire. Dans le doute, Alain Sars siffla tout de même un coup franc et sortit un carton jaune. Son assistant l'appela pour lui signifier que la sanction était trop légère et que le rouge s'imposait. Le Crom n'avait pourtant pas touché le ballon de la main, il n'était pas non plus le dernier défenseur. Et comme sa faute, du moins sur les images que donnaient le réalisateur à la télé, était tout sauf évidente, on pouvait comprendre les protestations des Aubois. Elles durèrent quatre minutes, le temps pour Eloge Enza Yamissi d'enfiler le maillot de Le Crom. « Souvent, à la fin des entraînements, il se met dans le but et demande à ce qu'on lui dire des penaltys, » racontera Furlan. En l'occurrence, c'est un coup franc qu'il lui fallait stopper, celui que botta Claudio Keserü. Et il n'y parvint pas.
Expulsion de Landreau et égalisation
Nantes semblait alors posséder tous les bonheurs. Or, il ne sut pas enfoncer le clou. Pas une seule fois, il ne sut se mettre en position de tir. Peut-être pour amener un peu plus de lucidité, Le Dizet effectua à son tour son troisième changement et Dimitrijevic remplaça Bamogo (80è). Deux minutes plus tard, la défense nantaise se montrait stupidement statique sur une offensive troyenne et elle permettait à Jaziri de s'offrir un face à face avec Landreau. Mickaël le perdait car s'il évitait le but il commettait en revanche une faute sur le Troyen. On s'attendait au penalty. Alain Sars, par compensation estiment les Nantais, crut judicieux de le corser par un carton rouge. Savinaud n'avait plus qu'à se tranformer à son tour en gardien du trésor. Mais il ne put rien faire sur le tir de Benjamin Nivet.
Déception
Troyes tenait son nul et il s'en contentait. Nantes se sentait en revanche frustré et il essayait de se lancer à l'assaut. Ses offensives étaient pourtant trop désordonnées, il gaspillait ses coups francs, ses corners qu'il expédiait devant le but comme s'il y avait encore un vrai gardien et seul Keserü parvenait à décocher un tir cadré. Mais Enza Yamissi se détendait du bon côté et stoppait le projectile sans broncher. « Sur ce coup-là, il nous a littéralement scotché, » assure Furlan. Et nous, Nantes nous a déçus.
B.V., le 15 février 2005