Nantes n'a pas un Utaka
Oui, John Utaka a marqué, et au moment où il a mis Nantes KO, lui montrant l'intérêt de posséder un buteur en état de frapper, la bise qui balayait la Beaujoire, est devenue plus aigre et plus froide, tandis que les Nantais étaient contraints de se regarder dans le miroir de leurs incertitudes. Incertitudes de l'avenir puisque les voici condamnés à regarder encore et toujours vers le bas du tableau, situation pas forcément rassurante avant un déplacement à Ajaccio. Incertitudes dans le jeu puisque leur manque d'efficacité a éclaté une nouvelle fois au grand jour, ils n'ont pas marqué en championnat depuis quatre matches, 360 interminables minutes, sans comptabiliser les arrêts de jeu. Incertitudes dans leur politique qui les amène à recruter un avant-centre blessé et à aligner au coup d'envoi une équipe où ne figure aucun des « renforts » de l'intersaison. D'accord Signorino était blessé mais qui, à part lui, a vraiment justifié son achat ?
Nantes a plutôt bien joué
Il ne faut pas croire pourtant que tout a été noir au cours de cette rencontre. Nantes a même plutôt bien joué, il s'est créé des occasions et il a si nettement dominé Rennes qu'on ne se hasardera certes pas à écrire que ce dernier a justifié sa victoire, ni surtout qu'il a montré que le leadership du football est en train de changer dans l'Ouest. On peut même considérer que l'équipe de Lazlo Boloni a réalisé un véritable hold-up. Sa combativité et son ardeur à se défendre pied à pied, qualités mises en exergue par son entraîneur, ne suffisent pas à masquer ses limites dans la construction du jeu et son manque d'imagination. Elle a œuvré en somme comme un journaliste qui parvient à faire oublier par quelques bonnes informations, deux buts en l'occurrence, ses lacunes dans le style. C'est bien mais c'est si mal rédigé que ça n'attire pas forcément les lecteurs longtemps. Il n'en reste pas moins que Nantes ne possède pas, on le répète, un atout du genre d'Utaka, un attaquant valeur-plus, capable de marquer un but sur la seule occasion qui se présente, rôle que peut tenir également Alexander Frei, même s'il ne l'a pas franchement confirmé face à Delhommeau.
Rennes marque sur sa première occasion
Nantes, au fond, s'est battu lui-même, en ne sachant pas exploiter ses occasions. La plus évidente fut évidemment le penalty raté par Claudio Keserü. On venait alors tout juste de dépasser la demi-heure de jeu et les Canaris venaient de subir, quelques secondes auparavant, un premier avatar, sous la forme d'un but d'Etienne Didot. Ce coup dur était paradoxalement intervenu alors que les Canaris commençaient à peser de plus en plus et de mieux en mieux sur la défense rennaise. Dimitrijevic, qui avait été décalé sur le côté gauche, était alors bien dans ses crampons et il s'était trouvé mêlé à la plupart des bonnes actions nantaises. La plus significative, à la 23è minute, s'était soldée par un shoot de Toulalan dont l'inlassable activité et la faculté à rendre les ballons propres a fait encore mieux comprendre combien son absence a été préjudiciable durant l'automne. Jérémy avait donc tenté sa chance d'un shoot de 25 mètres mais Simon Pouplin, parti pour vivre une belle soirée, s'était détendu et il avait dévié en corner. Et puis sur une action, un peu bizarre, presque vaseuse, Rennes avait eu la chance de transformer en but sa première situation dangereuse. Kallstrom était parvenu à récupérer le ballon sur le côté gauche, il avait feinté Guillon et adressé un centre que Delhommeau avait malencontreusement dévié pour Didot. Ce dernier, fort adroitement et sans tergiverser, avait logé le cuir dans les filets de Landreau
Keserü rate un penalty
Les Nantais se retrouvèrent donc lestés d'un handicap totalement immérité. Ils eurent cependant la possibilité de l'effacer tout de suite. Et sans soute de changer la face du match. A peine avaient-ils en effet réengagé que Dimitrijevic amena Bourillon à commettre une intervention litigieuse dans la surface. Keserü voulut se transformer en justicier, comme c'était prévu si pareille hypothèse se présentait. Or, à son grand dam, sur son tir décoché côté droit, il vit Pouplin bondir et renvoyer. Il n'avait plus qu'à se prendre la tête entre les mains. Il essaya de se rattraper, il fit d'ailleurs preuve d'une belle activité tout au long de la rencontre, mais ce n'était décidément pas son soir de veine. Il gâcha de nouveau une belle opportunité (reprise du gauche à côté) à la 37è minute puis, avec Diallo, ils ne parvinrent pas à exploiter un bon ballon de contre (40è). Ce n'était d'ailleurs pas non plus soir de chance pour le Malien qui, souffrant des adducteurs, laissa sa place à Bamogo juste avant la pause, laquelle fut atteinte après une tentative lointaine de Guillon que Pouplin avait réduite à néant.
Da Rocha dans un « off day »
Nantes avait donc produit du jeu durant cette première période, il s'était aussi procuré des occasions mais il était bel et bien mené. Faute d'adresse et de réussite, de punch aussi. Mais si Keserü était malheureux, le si exemplaire Frédéric Da Rocha, le « vieux soldat », était, lui, carrément inexistant et force est de constater que cela ne s'arrangea pas durant le second acte. Plus le match avançait, moins il était à l'aise et quand Le Dizet, à la 59è minute, demanda à Dimitrijevic de sortir pour laisser place à Capoue on n'est pas sûr qu'il ait effectué le bon choix. Même si l'ancien Briviste avait également baissé de pied. On pourrait faire aussi remarquer que lorsqu'on mise sur un joueur comme l'ancien Romorantinais pour tenir le rôle du sauveur, on met le doigt sur certaines limites dans l'effectif. Dans les matches de Lyon, à la même heure, Houllier fait entrer Wiltord ou Govou. Ou Fred. Sans faire injure à Capoue, on admettra que ce n'est pas tout à fait le même niveau.
Corners sans efficacité
Nantes pourtant croyait encore au renversement de situation d'autant que les Rennais ne faisaient que subir et défendre, se montrant littéralement incapables de s'approcher à moins de 30 mètres de Landreau. La méthode n'était pas vraiment spectaculaire. Mais elle se révéla rudement efficace d'autant que Pouplin intervenait encore devant Bamogo (50è) puis Toulalan (59è). D'autant aussi que les Canaris accumulaient les corners sans être capables d'en exploiter un seul. C'en était presque désespérant. Emerse Faé essayait d'impulser les changements de rythme qui faisaient trop défaut mais les Rennais l'avaient à l'œil et Faty le stoppait ainsi d'une manière plus qu'illicite, à la 66è minute. Pour la forme, l'arbitre le gratifia d'un carton jaune ; dans l'esprit il aurait pu faire plus. Le coup de masse arriva peu après, à la 70è minute on l'a dit, et il fut signé Utaka qui profita à la fois d'un bon service de Kallstrom et d'un cadeau de Mauro Cetto. Deux buts de retard, le score ne reflétait vraiment pas la physionomie de la partie, mais le handicap était devenu trop lourd pour que les Nantais conservent l'espoir de rétablir l'équilibre. Comment marquer deux buts en 20 minutes quand on n'a pas fait clignoter le tableau d'affichage depuis plus de six heures ? Le problème reste entier, il faudra bien pourtant le résoudre face à Valenciennes.
B.V. le 05 janvier 2006.