Lorsque dans la présentation du match nous écrivions : « parvenir à contenir Ribery et Oruma doit aussi occuper l'esprit de Serge Le Dizet », on ne pensait pas que les deux meilleurs marseillais seraient aussi les deux buteurs. Evidemment il est toujours aisé de rappeler une prédiction plutôt évidente, mais le coach nantais doit bien avoir conscience que sa réponse tactique, essentiellement dans ses choix au milieu de terrain, n'a pas répondu à ses attentes. Il invoquera l'absence de Toulalan pour expliquer cette faillite sur ces deux buts « dans une zone qu'il sait bien nettoyer ». Mais le forfait de Toulalan était une donnée de départ. Elle montre aussi à quel point ce joueur est absolument indispensable. La marge de manœuvre de l'entraîneur nantais n'était pas énorme. Il avait choisi un milieu renforcé de 3 éléments axiaux, copie conforme du choix de Jean Fernandez.
Mais ce milieu inédit n'a pas eu l'influence escomptée. A plusieurs reprises, notamment en première période, on a d'ailleurs vu Pascal Delhommeau devoir monter seul et bien trop haut pour combler les espaces dans l'axe entre les défenseurs et les milieux. C'est, entre autre, le cas sur le premier but. Une réalisation marseillaise à la conclusion d'une remise en touche, où les Nantais, en place et en nombre, ont une nouvelle fois fait preuve d'une passivité déconcertante. C'est anodin une remise en touche. Mais il suffit d'observer les autres équipes, solides au marquage, pour comprendre qu'il est pourtant important de gêner au maximum l'adversaire, de lui faire sentir « qu'on est là ». Serge Le Dizet insistait pourtant sur cet aspect du jeu en fin de saison dernière, mais on en reste toujours au même constat, les Nantais laissent jouer et, dans une attitude de zone, s'en remettent au petit copain. Il serait peut-être bon que, à l'instar du changement tactique opéré sur les coups de pied arrêtés et qui est désormais relayé en CFA et chez les 18 ans, on change aussi d'attitude sur les touches et que chacun sache ce qu'il a à faire et quel joueur il doit prendre.
Encore plus criant, sur le deuxième but, Ribery traîne entre les deux lignes et n'est pas gêné au moment de frapper. Pour le reste on soulignera tout de même que , hormis la dernière occasion de Nasri, les Nantais n'ont été mis en danger qu'à la suite de coup de pieds arrêtés.
Donc Ribery et Oruma, les deux marseillais étiquetés dangereux et capables de faire la différence à eux seul, ont été trop influents. Or, coté droit, Serge Le Dizet s'entête à maintenir Jean-Jacques Pierre. Il est pourtant criant que l'international haïtien n'est pas fait pour ce poste. Il lui reprochait d'ailleurs de ne pas en faire assez, mais le peut-il alors qu'il n'a pas été formé à ce poste ? On comprend malgré tout qu'il était délicat et injuste de sortir Delhommeau après sa très bonne prestation face à Nancy. On sait aussi que Savinaud n'aurait sans doute pas fait l'affaire non plus face à Ribery. Il ne restait que la solution Leray, mais celui-ci est hors de forme actuellement. Si on oublie Norbert, l'éternel blessé, le seul susceptible de véritablement enquiquiner Ribery joue désormais à Troyes. On ne rappellera jamais assez combien nous avons été étonnés que David Leray soit préféré à Stephen Drouin et que Nantes ne compte pas sur son international espoir cette saison. A tel point qu'on se demande parfois si certains agents ne sont pas trop influents et n'entretiennent pas des amitiés ou inimitiés qui nuisent au final à l'équipe. Hervé Marchal qui s'occupe de Drouin a vu tous ses joueurs quitter le club soit en prêt, soit définitivement (Vincent Laban entre autre). Tandis qu'Axel Lablatinière, l'agent qui a le plus de Nantais sous contrat, et non des moindres, a du se réjouir de voir que Leray, un de ses poulains, reste à Nantes. Que dire aussi quand on constate que Gilles Yapi, sort du groupe, dès l'instant où il décide de ne plus travailler avec Lablatinière, lequel l'avait sous contrat au même titre que Milos Dimitrijevic… mais ce ne sont peut-être que pures coïncidences entre deux agents pressentis pour être en concurrence à la succession de Robert Budzynski… Un agent à la direction technique… l'horreur.
Hormis l'épineux problème du latéral droit, qui se pose aujourd'hui plus qu'hier du fait du départ de Stephen Drouin, lequel, dans la hargne, est bien équivalent à Signorino, Serge Le Dizet avait la possibilité de titulariser le jeune Bocundji Ca pour coller aux basques de Wilson Oruma. Certes, ce choix aurait opéré au détriment du jeu, puisque le Guinéen est encore bien tendre sur ce point et qu'il ne paraît pas non plus aussi appliqué et ambitieux qu'auparavant. Un premier contrat pro est parfois difficile à bien digérer… Mais Serge Le Dizet a déjà fait ce choix par le passé. Et puis concernant le jeu, lorsque Serge Le Dizet l'envoi sur la touche au profit de l'efficacité, on imagine qu'il peut aussi aller au bout de ses idées…
Or l'efficacité révélée face au Mans et Nancy fut aussi très chanceuse. Elle le fut aussi au Stade Vélodrome et elle ne permet pas de se projeter bien loin. Du moins pas plus loin que là trêve, une période propice aux changements d'entraîneurs ces derniers temps sur les bords de l'Erdre. A Nantes, par une concurrence mal vécue, tout le monde essaye de sauver sa place. Il est vrai que c'est un socle pour se projeter vers demain. Et si le jeu revient on oubliera bien volontiers d'avoir été contraint d'en passer par là, mais en attendant, on semble parfois retrouver les vieux démons de la saison dernière, quand personne n'ose, quand tout le monde à peur de mal faire, avec pour résultante que chacun joue pour sa peau… et que l'ambiance s'en ressent.
Alors Nantes ne plie plus par manque de mental depuis la bonne tenue lilloise, mais l'allant et la prise de risque collective sont toujours aux abonnés absents.
Enfin, juste pour l'anecdote, lors de cette rencontre, on a pu observer deux ex-joueurs de National, mis en concurrence à l'intersaison 2004-2005 pour rejoindre le FC Nantes. Entre Ribéry et Capoue, il n'y a évidemment pas photo. Si les deux joueurs avaient tout deux la même carte de visite sulfureuse (Ribery à Brest et Capoue à Niort avant Romorantin), l'écart de talent ne fait pas de doute. Capoue n'a pourtant pas démérité, même s'il agace par certains gestes faciles inefficaces ou par sa propension à tomber dès qu'il perd la balle que ce soit quand il la donne ou quand on la lui prend. Capoue est-il meilleur que M'Hadhbi ? Les deux sont-ils assez bons pour Nantes ? Il est pourtant plus facile de jouer avec Signorino qu'avec Viveros. Alors faut-il absolument à ce poste un joueur de débordement, à fortiori quand ceux-ci ne sont pas convaincants dans ce registre ? La question mérite d'être posée… Et si la réponse est négative, on préfère un M'Hadhbi qui prend des risques à un Capoue qui fait le minimum syndical pour ne pas trop déplaire à un coach qui a décidé de le relancer.
F.P. le 22 novembre 2005