Sourions : « c'est la marque des grandes équipes »
Comme la semaine dernière on pourrait verser dans la philosophie de bas-étage, à l'image de journalistes qui ne sauraient pas quoi dire ou de techniciens conformistes et écrire naïvement : « eh, eh gagner de cette façon, en se créant si peu d'occasions, c'est la marque des grandes équipes. » On s'en gardera évidemment et si on vous sert une telle ineptie, c'est uniquement pour rappeler comme ça, au passage, combien les jugements tout faits et à courte vue sont monnaie courante dans le petit monde du football. Et combien aussi il faut éviter de s'y référer en permanence. La vérité est qu'il y a peu de grandes équipes en championnat de France et que même Lyon avait joué petitement à Toulouse, deux heures avant que ne débute Nantes-Nancy. Ce qui ne l'empêcha pas de gagner (encore un but à la suite d'un coup de pied arrêté) et amena Dominique Arribagé à déclarer doctement, comme s'il venait de découvrir la poudre de perlimpimpin : « s'imposer de cette façon, contre le cours du jeu, c'est la marque des grandes équipes… » Comment fait-il pour être aussi bête ?
Première demi-heure très médiocre
On a évoqué le niveau du championnat et Pablo Corréa, l'entraîneur nancéien, se laissa aller à en parler au cours de ses commentaires d'après match. « Le public a dû se poser des questions à ce sujet en première période, tant le spectacle était mauvais » reconnut-il. Et c'est vrai que durant presque toute la première demi-heure, les ailes du talent ne portèrent pas les acteurs qui, sur la pelouse, avaient visiblement du mal à se livrer, à se libérer et à aller au bout d'offensives ne parvenant pas à éclore. Le match demeurait bloqué et confiné dans des actions sans envergure, dont l'essentiel se tramait en milieu de terrain. On ne voyait pas grand chose, à part la maîtrise de Toulalan. Et, aussi, une erreur de jugement de Cetto sur un ballon aérien, copie quasi-conforme de celle commise une semaine plus tôt durant les arrêts de jeu face au Mans et qui avait alors nécessité un superbe sauvetage de Landreau. L'Argentin se laissa donc lober et le ballon atterrit derrière lui, dans les pieds de Kim. Lequel, peut-être lui-même étonné par l'aubaine, ne sut pas l'exploiter (19è).
But de Da Rocha
En somme, Nantes, aidé par le manque d'opportunisme et d'adresse de l'attaquant brésilien, n'avait même pas eu chaud ! Et lorsque la chance frappa à sa porte, il eut la bonne idée de la saisir à bras le corps. Ou plutôt au rebond, d'une superbe frappe en pleine course. On atteignait alors la 27è minute et Bracigliano n'avait pu que repousser, sur sa gauche, un premier shoot de Keserü. Frédéric Da Rocha se montra le plus prompt à réagir et, arrivant à toute allure, malgré un angle fermé, il catapulta un bolide au fond des filets lorrains. C'était le premier tir nantais de la partie et c'était bien payé pour une équipe qui avait exactement la même configuration que face à Lyon et au Mans, avec Toulalan et Savinaud dans l'entre jeu et Capoue chargé d'animer le flanc gauche, mission qui se révélait d'ailleurs très au-dessus de ses capacités. Ses sprints épisodiques ne suffisaient pas à dissimuler ses déficiences au niveau de la technique, de la combativité et de la perception du jeu. L'un de ses centres aurait pu pourtant déboucher sur un résultat plus concret si Da Rocha ne s'était révélé quelques cheveux trop court (31è). Le même Da Rocha s'inscrivit au cœur d'une attaque enfin séduisante, alors qu'approchait la pause, et qui se termina par un centre de Jean-Jacques Pierre. Cette fois, c'est à Keserü que les centimètres manquèrent (38è).
L'exemplaire Signorino double la mise
Dès le début de la seconde période, Nancy afficha de nouvelles dispositions auxquelles les entrées en jeu de Zerka et Biancalani ne furent pas étrangères. Les Lorrains attaquèrent surtout sur l'aile gauche et Pierre se retrouva très vite dans ses petits crampons. A la peine, si vous préférez. Sur un centre en retrait de Zerka, Kim eut bel et bien un ballon d'égalisation au bout du pied. Il l'expédia au-dessus (49è). Une fois cette alerte passée, Nantes se mit cependant à mieux jouer et c'est même au terme d'une superbe offensive qu'il réalisa le break. Toulalan participa à son élaboration, c'est lui qui alerta Capoue sur l'aile gauche. Le centre de l'ancien Romorantinais fut renvoyé de la tête par Diakhaté. Sans doute aurait-il été mieux inspiré en laissant le ballon à Bracigliano. Franck Signorino, encore épatant tout au long de ce match, ne se posa pas la question. Il reprit de volée du gauche et son tir, légèrement dévié par N'Guémo, prit la direction du but (63è).
Le KO pour Bamogo
A 2-0, on pouvait enfin respirer. Le public ne s'en priva pas. Il scanda le nom de l'ex-Messin. C'était mérité. Il fit même la ola. Le spectacle ne valait sans doute pas pareil enthousiasme mais c'était plus sympa que les réprobations de la semaine précédente. En outre, Bamogo qui avait succédé à Keserü, eut le bon goût d'ajouter un troisième but. Adroitement lancé par Savinaud, d'une passe dosée au centigramme, il se présenta seul devant Bracigliano qu'il esquiva en plaçant le ballon sur sa droite et en le contournant (69è).
Sourires retrouvés
Dès lors, la partie devint facile pour les Canaris qui eurent même la possibilité d'alourdir la marque, notamment par Diallo. Faé avait remplacé Pierre, toujours peu à l'aise, ce changement valant à Savinaud de retrouver le poste d'arrière droit. Signorino se fit encore remarquer en s'incluant dans plusieurs bons coups. Mais c'est à Mickaël Landreau que revint l'ultime occasion de se distinguer, lorsqu'il repoussa, à quatre minutes de la fin, une tête de Kim. Quelques instants plus tard, il tombait dans les bras de son vieux complice Fred Da Rocha. Nantes a retrouvé le sourire. C'est assurément le meilleur moyen pour retrouver aussi son jeu.
B.V. le 6 novembre 2005.