Ne pas battre ce Metz là, celui de Joël Muller, est évidemment une contre-performance. Le FC Nantes version Le Dizet-Roussillon, une association qui ne va pas de soi ces temps derniers, reste une équipe de milieu de tableau. « De la 8ème à la 15ème place », c'est même une formation pas loin de devoir une nouvelle fois lutter pour son maintien parmi l'élite une deuxième saison d'affilée. Si on suit cette logique, Nantes connaîtra d'autres nouveaux couacs et quelques surprises encourageantes. Mais le supporter est toujours enclin à croire que ses favoris valent mieux que le spectacle offert. Les joueurs y croient tout autant. Certes le FC Nantes n'a pas une défense exceptionnelle, certes la qualité des attaquants n'est pas proportionnelle au nombre dont dispose Serge Le Dizet. Mais au moins, au milieu, puisque Toulalan est toujours là, les Canaris ne sont pas mal pourvus. Il est question de se renforcer : en défense, Jean-Jacques Pierre a signé aujourd'hui pour trois ans et un million d'euros, en attaque, le cas Portillo fait débat, il reste deux jours pour se décider.
Profiter de la confiance pour restaurer le jeu
Il semble pourtant que le mal nantais est collectif. Ne l'a-t-il pas toujours été par essence ? Samedi soir, il était criant de voir à quel point les préceptes du jeu sans ballon ont été oubliés. Le mouvement n'a duré que 15 minutes, il s'est étiolé au point qu'on se dise parfois que le salut viendrait de la prise d'initiative individuelle. Cette idée est aussi la résultante d'une analyse développée par Serge Le Dizet. Elle part d'un constat sur le manque de valeur individuelle qui dessert les desseins collectifs et donc le « jeu à la Nantaise » tel qu'on l'aime. Certains pensent qu'il ne peut plus se conjuguer avec les impératifs et la rigueur tactique du football moderne. Ce jeu marque de fabrique du FC Nantes est certes basé sur l'inspiration personnelle et les aspirations à jouer ensemble, selon les qualités, surtout, et les défauts, aussi, de chacun, mais il est également rigueur. Suaudeau, Denoueix des entraîneurs pas rigoureux ? on s'étouffe. Le Dizet est de cette filiation. Il doit donc profiter de la confiance qui anime encore son équipe pour insister sur le jeu sans ballon, sur l'anticipation, sur le mouvement, sur l'intelligence. C'est du travail et ça n'est pas du pré-mâché enfermé dans un schéma. Mais on en revient toujours à la même question : ce FC Nantes là, évalué moyen par son coach, en a-t-il la possibilité, en a-t-il toutes les caractéristiques ?
Accompagnez-vous !
Samedi, cette rigueur s'est encore conjuguée avec la peur parfois mais surtout, « la solution c'est l'autre », avec un attentisme coupable. Pas celui qui vous fait ne pas aller de l'avant, non, celui qui vous incline à être spectateur du jeu et des initiatives des partenaires, sans les accompagner, sans anticiper ce qui peut en découler (un contre, une balle qui traîne, un surnombre dans la surface adverse). Le mal principal n'est-il pas là ? davantage que dans les schémas tactiques, davantage que dans les faillites individuelles... il n'y en eut d'ailleurs pas ou presque pas. Le mouvement tout azimut est à restaurer. Le FC Nantes est une des rares équipes « de milieu de tableau » qui souhaite prendre un match à son compte. Forcément, sur sa valeur, des équipes comme Metz ou Ajaccio, lui poseront des problèmes. On semble se pencher sur des solutions tactiques, comme samedi, alors que logiquement, si on veut prendre le jeu en charge, il faut le servir.
Yapi milieu reculé : une latitude sans effet.
Face à Metz, le schéma de départ à évolué au cours de la rencontre. Au milieu, Yapi a très vite reculé tandis que Toulalan se retrouvait à évoluer plus haut. Bamogo, d'abord axial, a du prendre la place de Diallo et demander les ballons coté droit, tandis que Pujol restait dans l'axe. La première évolution au milieu n'a pas été concluante. Certes elle permettait de presser plus haut, mais une fois le premier rideau passé, elle a demandé des efforts accrus pour boucher les trous même si Yapi a récupéré bon nombre de ballons. En outre le jeune Ivoirien a cherché les redoublements de passe sécurisant, quand il fallait jouer davantage vers l'avant quitte à initier le jeu en première intention par une préparation plus posée. Yapi seul milieu défensif, c'est aussi prendre le risque de perdre le défi physique ou perdre le ballon sur un dribble dans une zone où il faut l'éviter. Yapi a donc joué parfois trop prudemment et il a bizarrement semblé manquer de solutions. Il a beaucoup essayé, beaucoup varié, mais combien de fois, alors qu'il avait le ballon, tous les milieux faisaient la même course vers l'avant le privant de soutien si ce n'est à jouer vers l'arrière ou de manière trop latérale.
Un coté droit déserté.
La sortie de Diallo a certainement été préjudiciable d'autant que le choix de Pujol au dépend de Keseru (buteur en CFA) était discutable à la base, à moins de vouloir prêter le franc-comtois dans les jours qui viennent… Bamogo, auteur d'une rencontre intéressante, a rechigné à se désaxer. Or si, avec Signorino, plus qu'avec M'Hadhbi, le FC Nantes a trouvé des solutions à gauche, son coté droit était orphelin des redoublements entre Da Rocha et Savinaud. Le second n'est monté que très rarement, car il n'avait pas les relais nécessaires. Si le premier avoue préférer l'axe c'est qu'il a deviné la saison dernière qu'il est désormais trop juste pour prendre le meilleur sur son adversaire coté droit quand il faut en plus multiplier les allers et retours dans le couloir.
Keseru et Dimitrijevic buteurs… en CFA.
Da Rocha sur le banc, Diallo sorti, l'équilibre sur le coté n'était plus respecté. L'entrée en jeu de David Leray n'a pas apporté non plus la solution attendue. Avant cela, Yapi avait pris le couloir comme pour montrer qu'il fallait absolument un joueur à cet endroit. Mal lui en prit puisqu'il fut remplacé. Un choix délibéré de la part de Le Dizet, mais aussi un peu discutable. Avoir à la fois Drouin et Leray sur le banc s'imposait-il ? Certes Keseru et Dimitrijevic ont eu du temps de jeu en CFA (ils en ont profité pour marquer tous les deux), mais le second aurait semblé plus utile à domicile que Leray, tandis que le Roumain est un joueur capable de débloquer une situation. Déjà, il avait totalement dominé le premier match de CFA, à tel point qu'il joua parfois trop facile, quand Pujol était totalement hors course (et en reprise aussi). Les deux sont buteurs avec la réserve, le second a été préféré au premier. Pourquoi pas après tout. Les sifflets injustes (il revenait à la compétition) lors de son remplacement ne serviront pas sa confiance et font douter de l'opportunité de ce choix à domicile… Landreau eut beau demander un peu de mansuétude par des applaudissements, rien n'y fit. Le FC Nantes est retourné dans son train train de résultats mièvres et son public est retombé dans ses mauvaises habitudes d'enfant gatées alors que la période n'est plus aux cadeaux depuis belle lurette... Le 28 mai est loin.
Frédéric Porcher, le 29 août 2005