Il y avait de nombreux pros sur le terrain et il y avait du beau monde, moins un, en tribune. Serge Le Dizet avait donné du temps de jeu à certaines de ses ouailles, il était venu juger par lui-même ce qu'ils allaient en faire. La présence de Landreau et Savinaud était plus inhabituelle mais tout aussi rassurante, pour voir entre autre la prestation de l'ami capitaine Quint, toujours heureux de pouvoir jouer et se rassurer sur son genou. Japhet N'Doram était là lui aussi. Après avoir critiqué la qualité des « jeunes », il avait donné le ton suite au match nul concédé face à Troyes, et s'inquiétait peut-être de constater que le manque de conscience professionnelle pouvait éventuellement se prolonger chez les pros rétrogradés. Ce ne fut pas le cas. Robert Budzynski était là lui aussi, tout comme Gilles Rampillon, qui restera à jamais le meilleur marqueur de ce bon vieux Saupin.
Puisqu'il était là, excusez-nous de parler encore de lui.
Il y avait aussi qui vous savez. L'ex-Président rétrogradé directeur général ou, au choix, président exécutif par intérim, avait mis l'habit fictif, un peu Saupin, un peu « peuple ». Il est vrai qu'il venait parfois la saison dernière. Attention pas en fin de saison dernière évidemment. A ce moment là, il était dit protégé par cordon policier. L'ex-toujours là qui a creusé un déficit gargantuesque, a depuis été entendu par la police judiciaire pour des emplois fictifs entre amis, rien que ça. On vous laisse deviner à qui profite généralement ce genre de pratique. Où en est l'enquête ? Pour quelles conséquences ? Classée sans suite ? En attendant, il est toujours à Nantes, grassement payé, et ose désormais se montrer davantage, sans honte, protégé autrement. Comment l'expliquer ? Immunité des réseaux ? C'est plus diffus. C'est diablement, tristement, efficace.
Ainsi va la vie, ainsi va le foot. Descente évitée miraculeusement, dépôt de bilan évité grâce au maintien, cinq ans de déficits cumulés révélés au Parisien, et emplois fictifs présumés, comme si ça ne suffisait pas. Et vous l'aurez remarqué, les observateurs autorisés, nouveaux chiens de garde avisés prompt à l'auto-censure intéressée, n'estiment pas avoir à faire de choux gras de cette histoire là…
Nantes / Poitiers, destins croisés.
On le concède, ça fait un sale effet, en tribune, de croiser le regard de ce monsieur là. On s'égare à ressasser nos vieilles rancœurs jusqu'à l'écœurement contre productif. On n'est pas venu pour ça, on tourne le dos et on regarde les pros de la réserve en découdre avec les Poitevins. Poitiers, un club crée en 1954, un stade de 12000 places, en connaît des difficultés. Il y a dix ans, le club était en L2. La Présidente a demandé la liquidation financière. 333 000 euros de trou dans les caisses, c'est trop. Le Maire ne veut pas sauver le club. Finalement le TGI prononce un redressement judiciaire (en savoir plus >>>). Le club finira la saison en CFA. La saison prochaine par contre, la rétrogradation est en vue. Alors on se souvient que Rudi Roussillon était dans les tribunes de La Beaujoire lors de ce fameux Nantes / Metz. Il devait parler. Mais, maintien miraculeusement acquis, il reparti silencieux à Paris. Que devait donc nous dire notre nouveau Président, si Nantes était descendu en L2 ? Que devait-il prononcer, alors qu'on apprenait par Le Parisien, début janvier, que le club était alors en situation de dépôt de bilan ?
Mais revenons au terrain. Nos pros sont là. Ils ont gagné. Un troisième 2-1 consécutif à domicile. Pas de quoi pavoiser à chaque fois. Pros ou pas, Nantes a toujours du mal à faire le jeu et à faire la différence à domicile. Une équipe réserve pleine de joueurs confirmés n'est pas une garantie de spectacle et d'efficacité. Les joueurs pros n'estiment pas forcément être là pour les mêmes raisons, bonnes ou mauvaises. L'équipe formée est souvent une première et la cohésion est loin d'être au rendez-vous. Revue d'effectif.
La défense
Radic est dans les buts, fraîchement revenu du banc de Gerland. A part des matchs amicaux à l'étage supérieur, il n'a connu que la formation et la CFA. Radic va faire un gros match. Ce qu'on attend d'un gardien : être décisif quand il n'y a pas grand chose à faire. Landreau a du apprécier. Il lui reste tout de même à progresser dans son jeu au pied. S'il n'a pas eu grand chose à faire, c'est évidemment que Nantes à dominé et a eu le monopole du ballon la plupart du temps. Ça ne rime pas non plus avec un paquets d'occasions, ça n'empêche pas les mauvais choix.
Devant lui, il y a 4 arrières centraux. Das Neves commence à se la jouer Savinaud. Tantôt au centre, son poste, tantôt milieu défensif (contre Albi), cette fois il est arrière droit. Pas toujours heureux Das Neves, mais toujours bon. Il a même débordé et dribblé dans la surface adverse puis donné à Keserü un caviar qui passera de peu à coté (57'). Il s'est exilé à droite, comme Gour, autre arrière central de jeune « métier », qui est lui exilé à gauche. Il est sérieux Gour, il est timide aussi. C'est sa première année en CFA, il fait toujours parti de l'effectif des 18 ans. Il assure un peu, pas toujours.
Ecartez-vous de là qu'on s'y mettent, la charnière centrale est internationale et championne. Il y a le Thicot et l'El Mourabet. Ces gars là ont déjà un nom. Ils ont gagné un contrat aussi qu'il fallait leur signer avant qu'ils aillent se monnayer ailleurs, comme Larbi parti en Tunisie, sans avoir de nom, juste un potentiel à sacrément dégrossir. Les deux de la charnière ont assurément du talent et du métier, mais ils sont jeunes, laissons leur le temps. Pour l'instant c'est trop tôt et leur prestation du moment ne viendra pas contredire ce constat.
Les milieu axiaux
On le voit Stéphane Moreau a mis les pros à leur poste et les autres ont du évoluer là où il restait de la place. Diop s'est donc retrouvé milieu défensif. L'idée n'est pas mauvaise quand on assiste à l'évolution des meneurs de jeu. Il leur faut jouer plus bas, parfois s'exiler sur les cotés. Au final, ils ne mènent plus grand chose, car ça va trop vite, ça porte le ballon, ça impose son physique. Et quand décidément, ils n'y arrivent pas, on les prête en Suisse (Yapi) ou on les range sur le banc ou en CFA (Dimitrijevic). Fort heureusement pour le petit Diop (futur D'Yopi ?), il n'y avait pas grand chose à ratisser contre Poitiers. Juste à être attentif au placement, à la couverture et bien s'entendre avec Dimitrijevic. Quand l'un monte, l'autre pas. Diop a donc tenté de bien alimenter Quint, Dimitrijevic et les joueurs de couloir. On dit seulement « tenté » car il a toujours autant de déchet dans son jeu.
Dimitrijevic devant lui a été très loin de son niveau habituel en CFA. La plupart du temps il surnage, là il fut surtout très effacé. Au moins n'a-t-il pas cherché à se mettre trop en avant, comme c'est parfois le travers des pros au purgatoire. Un match en demi-teinte qui ne l'empêche tout de même pas de donner une passe millimétrée à Keserü pour le deuxième but. Devant lui, le Capitaine Quint s'est beaucoup démené. Il prend manifestement plaisir à rejouer des matchs pleins après une si longue absence. Il gagne en rythme. Reste à savoir s'il n'a pas sciemment oublié l'infortuné M'Hadhbi sur sa gauche. Il ne fut d'ailleurs pas le seul à sevrer le Tunisien durant toute la première mi-temps.
Les couloirs.
Il faut dire que durant cette période, M'Hadhbi ne fit rien de bon, ça en frisait même le ridicule. Après la pause par contre, quand enfin ses partenaires pensaient à jouer à 11, on revit un joueur capable de bonnes choses, notamment, après un bijou de transversale de Payet, un centre tendu parfait pour Keserü qui manqua sa reprise seul face au gardien (60').
Le Réunionnais Payet était effectivement à droite. Il nous a gratifié encore une fois de quelques superbes actions, même si ça manquait parfois de liant et de soutien autour de lui. Payet est pétri de talent. Il doit sans doute encore apprendre à mieux défendre. La différence entre Capoue et lui, doit être là. Et c'est ce qui peut expliquer en partie, le choix de Serge Le Dizet. Capoue n'a jamais vraiment été convaincant en CFA. Il y a tant de paramètres à prendre en compte. Il est en pro et trois prétendants remplaçants se démenaient sur la pelouse : Quint, M'Hadhbi et Payet.
Claudiu Keserü
Il fait plaisir à voir le Roumain. Non pas que sa prestation fut étincelante, mais il a saisi l'occasion pour marquer et être extrêmement présent dans la surface de vérité. Son premier but est absolument somptueux : contrôle dos au but, « je me mets la balle sur mon bon pied » et frappe éclair dans la niche. Le deuxième but, entaché d'un hors-jeu flagrant, c'est un face à face avec le gardien, après être parti du milieu du terrain : dribble sur la gauche et ballon redressé dans la cage. Keserü aurait pu marquer deux buts de plus à vrai dire. Surtout, il est capable de sortir des contrôles miraculeux et d'en foirer d'autres, sans parler de son jeu en première intention qui finit généralement dans les pieds d'un adversaire. Ses qualités de buteurs sont indéniables, mais son jeu reste toujours trop imprécis pour espérer devenir titulaire en L1 dans une équipe qui tente péniblement de faire le jeu et qui est déjà suffisamment maladroite dans la construction et l'animation.
Frédéric Porcher, le 21 février 2006