On sentait la menace des sifflets sourdre dans les tribunes
Le match voguait cahoteusement vers sa conclusion, laquelle s'annonçait amère car on entendait depuis plusieurs minutes le son des sifflets sourdre dans les tribunes. Les arrêts de jeu étaient entamés et déjà quelques spectateurs, déçus par une heure et demie d'une partie trop serrée, accrochée et laborieuse pour être excitante, avaient déserté leur places.

Ils avaient tort. En deux minutes, les deux dernières, les Nantais réalisèrent le KO qu'on n'attendait plus et ils s'offrirent à la fois une sortie triomphale et une belle bouffée d'oxygène puisque dorénavant Bastia se retrouve à 10 points. 7 s'il gagne son match en retard à Reims, 6 s'il récupère le point qui lui a été ôté sur le tapis vert.

Un bijou De Freitas - Goussé
L'arbitre avait décrété trois minutes d'arrêts de jeu et c'est aux 91è et 93è que les Canaris ont marqué deux buts. Le premier fut un véritable petit bijou, David De Freitas et Nicolas Goussé se transformant pour l'occasion en joailliers. C'est en effet une passe ciselée que l'ancien Amiénois adressa, dans le dos de Lorenzi, à son compère qui depuis son entrée en jeu se distinguait par sa mobilité et sa disponibilité. Le Thouarsais réussit, en finesse, à glisser hors de portée de Leca un ballon qui alla se ficher dans les filets, au ras du poteau.

Nantes menait 1-0, c'était peut-être mérité, en tout cas bien payé, et le mieux est qu'on en resta pas là. A ce but d'orfèvre, les Canaris ajoutèrent un but de renard, par la faute du gardien corse Jean-Louis Leca. Sur une passe en retrait d'un partenaire, sans doute pressé de relancer le jeu, il dégagea le ballon directement sur la poitrine de Filip Djordjevic. Le jeune Serbe ne laissa pas filer le cadeau, il signa illico presto le second but. Il ne restait plus à Pascal Viléo qu'à siffler la fin, laissant les Corses sur les fesses et projetant les Nantais dans les prés d'un bonheur inespéré.

Défense remaniée par rapport à Brest, Da Rocha blessé
Si nous avons consacré autant de lignes à ces deux minutes c'est évidemment parce que le scénario s'y est dénoué, c'est aussi parce que l'heure et demie qui avait précédé ne laissera guère de souvenirs, si ce n'est sur quelques chevilles et mollets nantais, parfois malmenés par des Corses ne donnant pas dans la dentelle. Frédéric Da Rocha dut pour sa part quitter la pelouse dès la 6è minute, victime apparemment d'un début de claquage. Les Canaris avaient entamé la partie selon un schéma assez semblable à celui de Brest, De Freitas et Faty oeuvrant à la récupération, Da Rocha et Babovic occupant les couloirs alors que Capoue avait été de nouveau invité à soutenir Bagayoko. En défense, les remaniements étaient en revanche profonds puisque Poulard et Pierre effectuaient leur retour au centre, Das Neves devenant arrière droit. Rémi Maréval, lui, avait été maintenu à gauche. La sortie prématurée de Da Rocha provoqua l'entrée en jeu de Shereni, en milieu défensif gauche, Faty coulissant à droite tandis que De Freitas héritait du couloir droit.

Manque de jeu en mouvement
On vit peu de construction, d'une part en raison de l'acharnement des Corses à obstruer les espaces, d'autre part à cause du manque de mouvements dans le jeu nantais. Le porteur du ballon disposait souvent d'un minimum de solutions et plus les minutes passaient plus le match se bloquait. Hormis des tentatives consécutives à des coups de pied arrêtés, Nantes ne se créait pas de situations opportunes. Qui dit coups de pieds arrêtés entend évidemment fautes et sur ce plan, les Corses faisaient très fort, trop fort même, notamment Yannick Cahuzac, petit fils de Pierre, ancien défenseur un peu rugueux de Toulouse et surtout ex-entraîneur emblématique du Gazelec d'Ajaccio et des Lions de Furiani. Il écopait d'un carton jaune dès la 16è minute et si Pascal Viléo s'était montré moins laxiste il aurait pu voir rouge avant la pause.

Le porteur du ballon sans solutions
Capoue courait beaucoup, Bagayoko attendait énormément et les brèches ne s'ouvraient pas. Si bien, ou plutôt si mal, que l'occasion la plus nette du premier acte fut bel et bien à inscrire à l'actif des Bastiais. Ce fut pour eux-aussi à la suite d'un coup franc, provoqué par une faute assez inutile de Pierre sur Licata (27è). Ce dernier essaya de se faire justice lui-même, Heurtebis repoussa le tir mais Lorenzi réagit plus promptement que les défenseurs nantais et le gardien des Canaris dut faire face à sa reprise de la tête. Il s'en tira encore à son avantage.

Au début de la seconde période, Michel Der Zakarian modifia sensiblement ses batteries, Capoue retrouvant le flanc gauche alors que Babovic était repositionné au centre. Le registre du Serbe est bien sûr différent de celui de l'ancien Romorantinais et Nantes évolua alors dans un 4-2-3-1 qui n'offrait cependant pas davantage de possibilités au porteur du ballon et on vit par exemple Maréval chercher vainement un partenaire démarqué alors qu'il était ballon au pied (53è minute).

Babovic provoque des fautes bastiaises
Bagayoko de son côté ne parvenait pas à prendre le meilleur sur ses opposants et la domination des Nantais demeurait stérile. Elle ne les mettait pas en outre à l'abri d'un mauvais coup, tel ce shoot de Liacta dévié en corner par Heurtebis (53è). De Freitas essayait de se recentrer pour peser davantage sur le jeu, Das Neves en profitait pour multiplier les montées et à la 72è minute il était victime, juste devant la surface de réparation, d'une charge qui aurait mérité au moins un carton jaune. Viléo, lui, décidait de laisser jouer, ayant discerné un pseudo-avantage dans le fait que le ballon était allé jusqu'à Shereni. Ce dernier se trouvait souvent à la peine, notamment dans ses relances. Babovic, lui, portait beaucoup le ballon, trop assurément. La question est de savoir si c'était uniquement par excès d'individualisme ou parce que ses partenaires ne se rendaient pas suffisamment disponibles. Il y avait sans doute des deux et la question va faire débat. A défaut d'être efficace, le Serbe provoquait en tout cas de nombreuses fautes et grâce à lui trois Bastiais étaient successivement avertis. Dans l'ordre Coulibaly (58è), Lorenzi (61è), Camara (79è).

L'heureuse, l'ébouriffante suite
La 66è minute fut marquée par l'entrée en jeu de Goussé qui remplaça Capoue, Babovic repassant alors sur le côté gauche alors que le meilleur buteur nantais depuis le début de la saison s'installait en pointe. Le FCN repassait donc en 4-4-2. Babovic bottait encore un coup franc (faute sur Bagayoko) largement au-dessus (84è) et on s'acheminait doucement mais sûrement, du moins en apparence, vers un peu reluisant 0-0.

On atteignait la 87è minute et les Bastiais mettaient de plus en plus le nez à la fenêtre, grâce à l'entrée de Frédéric Mendy qui rappelait Das Neves à ses devoirs défensifs, lorsque la partie, enfin, s'emballa. D'abord grâce à ce diable de Mendy qui contraignit Pierre à commettre une faute limite-limite. Viléo laissa d'autant plus jouer que l'attaquant corse parvint tout de même à tirer. Heurtebis se montra encore décisif. Les défenseurs canaris avaient à peine fini de digérer cette frayeur que déjà la contre-attaque se développait, faisant germer l'espoir. Babovic déborda sur la gauche et centra sur Djordjevic, entré en jeu quatre minutes plus tôt à la place de Bagayoko. Le but était au bout du pied du Serbe, Lorenzi s'interposa et éloigna le danger.

Allons, on se dit que cette fois le nul était quasi-inévitable. D'ailleurs les arrêts de jeu étaient entamés. Seulement trois minutes.

Vous connaissez la suite. L'heureuse, l'ébouriffante suite....

B.V., le 19 février 2008