Der Zakarian avait prévu quoiqu'il arrive de changer d'organisation
Pour préparer cette rencontre, Michel Der Zakarian devait solutionner à la fois l'absence de 5 titulaires, avec des cotés sinistrés (absence de Thomas et Da Rocha à droite et de Guillon et Capoue à gauche), et offrir la meilleure expression pour le stratège tchèque Marek Heinz. Le coach nantais a aussi déclaré que même sans ses blessés, il comptait aligner une défense à 5 pour contrecarrer l'aisance des bastiais sur les cotés : «  On savait Bastia très fort sur les côtés. Quoiqu'il arrive (cf. les blessés), je l'aurais fait (Presse Océan, mercredi).  » On se souvient que le coach nantais avait aussi déclaré qu'il avait « sa petite idée » pour utiliser au mieux Heinz, lorsque celui-ci a débarqué sur les bords de l'Erdre. Et manifestement, il n'est pas question de confier un coté au joueur le plus payé de l'effectif.

Jouer à 5 derrière pour « bloquer les couloirs » : tout sauf une évidence
Lorsque nous avons appris la veille de la rencontre que Der Zakarian comptait aligner Moullec dans le couloir appuyé par une défense centrale à trois avec El Mourabet à droite et si on ne rechignait pas au rébarbatif exercice de présentation d'avant match, nous aurions écrit : «  Nantes va souffrir sur le coté droit  ». Cette évidence a été flagrante en première période. Nous avions pu voir deux matchs de Bastia auparavant et Frédéric Mendy était le danger prioritaire, bien davantage que Ben Saada pas vraiment à l'aise quand il est bloqué sur un coté. On peut aussi avancer que l'idée de bloquer les couloirs en jouant dans la configuration choisie par Der Zakarian n'a rien d'une évidence tactique : jouer à 2 contre 2 dans un couloir c'est toujours mieux que de jouer à 1 et demi… même si tout peut dépendre des options choisies pour encadrer et animer cette option tactique. On ne sait pas qui supervise les matchs des adversaires à Nantes, mais celui-ci aurait pu être avisé de dissuader Der Zakarian de choisir une option qui aurait du conduire le FC Nantes vers une autre issue.

Lundi, il y eut donc de graves errements tactiques sur le coté droit. Bien que la défense semblait effectivement s'aligner sur 5 éléments en début de rencontre, Guillaume Moullec ne su rapidement plus comment se positionner au milieu d'un triangle bastiais qui faisait à tout coup le décalage dans son dos, tandis qu'El Mourabet ne pouvait complètement déserter son axe pour combler le déficit de l'ex-Lorientais. Face à Sedan, en coupe de la Ligue, on avait déjà noté que Moullec n'était pas toujours très respectueux des consignes lorsqu'il désertait son couloir pour jouer au milieu au grand désarroi de Der Zakarian.

Moullec était complètement paumé
Face à Bastia, on a pu s'étonner que l'ajustement tactique n'intervienne pas avant la mi-temps. Y a-t-il eu dès lors une mauvaise application des consignes au départ ou celles-ci étaient-elles tout simplement inadaptées ? Après la pause, De Freitas devint un soutien plus appuyé sur le coté et Guillaume Moullec se contenta d'une position plus prudente et moins hybride. A ce moment Nantes menait déjà 1-0 et Mendy devait ressentir un peu la fatigue. Mais on le rappelle, c'était un avantage heureux tandis que le déficit tactique coté droit aurait pu coûter la victoire, sans la maladresse bastiaise et la vigilance de Tony Heurtebis.

Il reste que si Nantes doit insister dans ce dispositif tactique, comme pourraient le laisser croire les déclarations de Der Zakarian, il faudra trouver des joueurs plus adaptés : Moullec avait déjà été pitoyable en latéral droit contre Nantes à La Beaujoire lorsqu'il évoluait à Lorient. On veut bien comprendre que le joueur, désiré par Der Zakarian en remplacement d'un Da Rocha poussé vers la sortie par le revanchard Gripond (qui se sera illustré encore une fois en recrutant toujours moins fort qu'un partant pour les résultats que l'on sait), ait le droit à un peu plus de temps de jeu qu'en début de saison, mais il nous semble qu'un Guillaume Norbert à déjà montré beaucoup plus d'aptitudes et d'abattages dans tous les domaines qu'une recrue qui n'est pour l'instant pas un renfort.

Un schéma pour libérer Heinz au milieu
Il faudra aussi se pencher sur la cas Heinz. Evoluer en 3-4-1-2 lui confère une liberté qu'il a mis à profit utilement à Bastia. Mais faut-il revoir un système qui a pour l'instant été relativement rassurant ? Face à Sedan, le Tchèque évoluait quasiment en 9 et demi au détriment d'un deuxième véritable attaquant. Avec le retour de Bagayoko est-ce que Der Zakarian poursuivra dans cette voie ? Le pauvre Keserü, dont l'entrée en jeu a été assez satisfaisante, serait dès lors relégué bien loin dans la hiérarchie des solutions offensives d'axe. Il faudra que le coach nantais trouve une solution probante au risque de se retrouver confronter au « syndrome Boukhari ». La touche technique apportée par Heinz ne peut pourtant pas faire de mal à un effectif qui, globalement, en manque cruellement.

Nantes redoutable sur coup de pied arrêté : une nouveauté !
Enfin si le jeu nantais a été encore d'une grande pauvreté, avec cette fois quelques circonstances atténuantes, on note que les Canaris ont encore obtenu la solution sur coup de pied arrêté. C'est la cinquième fois de la saison qu'il trouve le chemin du but de cette manière, pour 13 buts marqués. Cela représente indéniablement un très sérieux atout, d'autant qu'il s'agissait d'un des très gros points faibles des jaunes les saisons précédentes… en Ligue 1.

Les joueurs :

Heurtebis (7) : Il est décisif depuis trois matchs, sans être pourtant énormément sollicité. Capitaine d'un soir, il n'en a que plus de mérite. Les trois points lui reviennent en grande partie.

Moullec (3) : Complètement à coté de ses pompes en première période, il a été plus à l'aise après la repos. Mais que son apport est pauvre… sans compter une fâcheuse habitude, déjà remarquée en match amical, à perdre bêtement quelques ballons dangereux dans l'axe.

El Mourabet (4) : Sa première titularisation de la saison n'a pas été très convaincante. Entré en cours de partie au poste inhabituel pour lui de latéral droit face à Sedan, il occupait cette fois une position à laquelle il n'était semble-t-il pas vraiment préparé. El Mourabet est davantage un « stoppeur » qu'un « joueur de zone ». Il est nettement plus efficace lorsqu'il défend près des attaquants. Il a eu de ce fait beaucoup de mal à se situer entre son poste dans l'axe et la couverture des boulevards laissés par Moullec. Malgré un pourcentage de mauvaises relances trop important, il eut le soucis de jouer en première intention lorsque c'était possible.

Pierre (5) : Globalement, on peut dire que ses prestations sont un peu plus convaincantes que lors des premiers matchs. Il apparaît plus concentré et plus soucieux de son rendement personnel au service de l'équipe. Il s'est troué dangereusement une fois par mi-temps. Dans cette défense à 5, il a eu aussi tendance à se la jouer libéro et à couvrir des actions qui méritaient un alignement pour une mise hors-jeu. Sa relance est encore perfectible. Il a parfois été dominé dans les airs par Pentecôte. Il doit trouver une expression plus sereine, laquelle rassurera une défense dont il est le patron naturel.

Poulard (5) : Il est en progrès constant et a rapidement trouvé ses marques au sein de la défense, après des débuts délicats au Havre. A gauche de l'axe, il n'a pas laissé passer grand chose, si ce n'est, tout de même, Pentecôte sur la plus grosse occasion bastiaise, et a souvent dominé ses adversaires de la tête. Il est toujours soucieux de bien relancer, même s'il n'y parvient pas toujours. Aurait-il été aussi à l'aise s'il avait échangé sa place avec celle d'El Mourabet ?

Mareval (5) : Lui n'avait pas Mendy en face, mais seulement le méconnaissable Ben Saada. Il n'a pas connu trop de difficultés à bien bloquer son couloir et à bien s'entendre avec Poulard. Il a tenté de soutenir les offensives lorsque c'était possible, même s'il avait manifestement des consignes de prudence et si Heinz ne lui a pas toujours donné le ballon quand c'était possible. Physiquement, il semble au point.

Shereni (5.5) : Depuis le début de saison, le milieu de terrain en provenance de Guingamp a toujours été convaincant, sauf au Havre. On sait aussi qu'il peut être efficace (3 buts). Il est flagrant qu'il ne connaît pas le jeu en première intention et qu'il se complique parfois la vie inutilement. Il gagnerait à « nettoyer » son jeu et à relancer plus vite et plus simplement.. Défensivement il est un élément essentiel de ce début de saison. Même quand il est en difficulté balle au pied, il est difficile de le « bouger ».

De Freitas (4.5) : On pensait qu'il éclairerait le milieu du terrain nantais, or il n'est pour l'instant qu'un joueur de l'ombre. On attend donc qu'il se libère et qu'il apporte une touche technique plus flagrante au milieu. Les circonstances du match l'ont fait évoluer surtout défensivement où il fut notamment très utile après la pause. Il aura tout de même eu le mérite d'être à l'origine du seul but de la rencontre. Il fut remplacé par Bocundji Ca (72') qui mériterait certainement d'avoir sa chance en tant que titulaire, davantage que Moullec en tout cas.

Heinz (5) : Dans un rôle tactique plus clair, il fut plus convaincant et surtout plus utile que face à Sedan où il sembla davantage se soucier « d'amuser la galerie ». Il a permis à sa défense de souffler en étant très disponible pour la relance et dans la conservation du ballon, même s'il en perd encore trop et se complique la vie en ne choisissant pas toujours les orientations les plus évidentes sur les cotés.

Goussé  (4) : Toujours une grosse dépense d'énergie, beaucoup d'appels et un travail de harcèlement sur les premières relances adverses. Dans les phases offensives il a par contre eu du mal à véritablement exister. Il n'a jamais été aussi à l'aise qu'à coté de Bagayoko lors des deux premiers matchs. Son rendement est-il dépendant du retour du Malien ? Il fut remplacé par Keserü (68') qui se distingua davantage en tant que point d'ancrage plus technique, même s'il ne se retrouva pas en position de marquer

Dossevi (5) : Que le but lui soit attribué ou pas, il était bien là où il fallait. On n'oublie pas non plus qu'il avait su marquer sur sa seule occasion même si l'action ne fut pas validée pour cause de hors-jeu. Il est donc dans une période faste en matière d'efficacité (3 buts). Dans le jeu, il est aussi en progrès avec des déplacements utiles. Ces bons points, ajoutés à son impact dans les duels, relativisent sa faiblesse technique et sa forte propension à se trouver trop souvent en position de hors-jeu. Remplacé par Sekour (78') , lequel manqua d'un cheveux de marquer un but et manqua une passe pour une situation intéressante de contre.

Les Bastiais ont dominé sans se procurer énormément d'occasions. Il s'illustrèrent surtout en première période. On remarqua évidemment en premier lieu Frédéric Mendy qui a démontré qu'il pourrait jouer à nouveau au niveau au-dessus. Derrière lui, Harek se mit particulièrement en évidence même s'il eut le malheur de détourner le coup franc de De Freitas vers son but. Pour le reste, les Bastiais ont des soucis à se faire… On fut enfin étonné de voir un joueur courir « comme un lapin » en première mi-temps ( Cahuzac ) et avoir toutes les peines du monde à s'asseoir sur le banc après le repos, en s'aidant de béquilles.

F.P., le 7 septembre 2007